Destruction – Reconstruction de la bibliothèque universitaire 1944-1957

Exposition qui a été présentée à la Bibliothèque universitaire Pierre Sineux du 2 juin au 24 septembre 2014

La bibliothèque universitaire de Caen d’aujourd’hui est le fruit d’une histoire particulière : créée au 15e siècle, elle est riche de 300 000 documents en 1944 quand elle est complètement détruite dans les bombardements de la Libération.

Pendant les années qui ont suivi, la ténacité de Madeleine Dupasquier, directrice de la bibliothèque, conjuguée aux efforts du gouvernement français, a permis d’impulser un mouvement de solidarité qui a mobilisé nombre d’institutions ou de particuliers en France et à l’étranger.
Parallèlement à la reconstruction du bâtiment de l’Université, les collections ont donc été reconstituées patiemment à partir de dons ou de rachats.

Ce récit comprend quatre chapitres

Avant le chaos : la bibliothèque au début du 20e siècle

1879

Depuis sa création officielle, le 23 août 1879, la bibliothèque universitaire de Caen était logée dans des locaux de fortune, provisoires, inadaptés et exigus : au cours des années 1880, « la salle de lecture mal éclairée, mal aérée, pouvait à peine contenir 18 lecteurs » (source : rapport du conseil de l’université).

1901

En 1901, pour le Conseil de l’Université, l’édification d’une Bibliothèque est une priorité : « La principale question est l’achèvement du Palais de l’Université, par la construction d’une quatrième aile en bordure de la rue Saint-Sauveur… devenue nécessaire pour donner à la Bibliothèque les locaux qui lui manquent actuellement ».

1902

En 1902, néanmoins assuré de subventions de la part du Conseil Général du Calvados et de la ville de Caen « qui ne recule devant aucun sacrifice pour soutenir sa renommée de cité amie des Arts et des sciences… » le Conseil de l’Université s’alarme auprès du Ministère de l’instruction publique : « Nous n’avons de place que pour deux ans au plus… La situation est critique… Il faut qu’en 1904 les nouveaux bâtiments soient prêts ».

1903

Le 4 octobre 1903 a lieu la cérémonie de la pose de la première pierre de la Bibliothèque par le Ministre de l’Instruction publique et des Beaux-arts, Joseph Chaumié qui, le même jour, pose la première pierre de l’Hôpital Cléménceau et inaugure l’Ecole Normale Supérieure.

1904

1904 : « Faut-il s’étonner que les rayons soient combles et les salles trop restreintes ?…. Heureusement la construction que l’Université a pu entreprendre, grâce au généreux concours de l’Etat, du Département et de la Ville est très avancée ; le gros œuvre est terminé… ».

1905

En 1905, le Conseil de l’Université s’impatiente et se lamente : « Ils [les livres] envahissent le haut des meubles, quand ils n’encombrent pas les parquets ».

1906

Le 30 avril 1906 a lieu l’inauguration officielle de la Bibliothèque universitaire, œuvre de l’architecte départemental Henri-Charles DEGUERNEL (1856-1916) : spacieux et de belle facture, le bâtiment d’une longueur de 44 mètres est suffisamment vaste pour abriter 300 000 volumes sur 3 étages. La salle de lecture, lumineuse et spacieuse (longue de 22 mètres et d’une hauteur de plafond de 6 mètres) peut accueillir plus de 100 lecteurs.

1908

Le conseil de l’université ne tarit pas d’éloges sur la nouvelle construction, en 1908, dans son rapport au Ministère :
« Notre Bibliothèque Universitaire est un précieux instrument de travail : ses locaux sont admirablement aménagés : notre regretté Recteur [Edgar Zevort] avait consacré ses efforts et ses soins à assurer, dans les meilleures conditions possibles leur construction et leur installation… Le résultat obtenu est excellent, sans que le chiffre prévu pour les dépenses ait été dépassé. »

1914-1922

Car la nouvelle bibliothèque, « certainement la partie la mieux aménagée du palais des Facultés » est un lieu de vie où se rencontrent quotidiennement étudiants et professeurs ; pour ces derniers, c’est le « Centre de notre vie commune » [1914] ou encore de « Foyer de la vie intellectuelle de l’ université » [1922].

(Photo)

Dans Le Mois à Caen, Robert Carabie raconte :
« Quand j’évoque mes nombreuses séances de lecture à la Bibliothèque, deux séries d’images me reviennent plus spécialement en mémoire. 
Ce sont d’abord les fins d’après-midi d’hiver, alors que les rangées de lampes alignées sur les tables dessinaient de multiples zones lumineuses, autour desquelles les étudiants se rassemblaient en groupes studieux.

Ce sont aussi, les vendredis matin, quand le beau temps permettait d’ouvrir les fenêtres au soleil, les rumeurs du marché Saint-Sauveur envahissant la salle de la Bibliothèque ; et, plus particulièrement, résonnent encore à mes oreilles, après tant d’années, les propos assez verts et les interpellations vigoureuses des marchandes de poisson, dont les baladeuses s’alignaient alors en haut de la rue Demolombe : curieuse confrontation des nourritures matérielles et des nourritures intellectuelles ! » (source: « L’Ancien palais de l’Université: souvenirs d’avant-guerre » par Robert carabie , in «Le mois à Caen», juin 1968, n°66).

1944: la bibliothèque sinistrée

Le 7 juillet 194422h07, les aiguilles des pendules de l’Université, touchée par le bombardement précédant l’entrée des Alliés dans Caen le 9, se figent définitivement.

« De là [place Guillouard] nous apercevons tout à coup un ciel immensément rouge dans la direction de la place St Sauveur. On nous dit que la Faculté est en flammes. Hélas ! C’était vrai !… Nous y courons [au couvent des Bénédictines] en remontant par la rue Demolombe. Déjà nous sentons la chaleur dégagée par l’incendie de la Faculté, devenue un brasier formidable… »
(source: Jean-Marie Girault, lycéen à l’institution Sainte-Marie, membre des Equipes d’Urgence de la Croix-Rouge française et futur maire de Caen. Mon été 44 : les ruines de l’adolescence).

« Plus grave encore que la destruction des murs, l’anéantissement des collections de la Bibliothèque universitaire posait pour l’enseignement futur un problème majeur. »
(source: Jean Yver « L’Université de Caen », Etudes normandes, 1954, n° 37)

Façade de la Bibliothèque
Murs de la Bibliothèque détruits
Destruction de la Bibliothèque

Pour une population de 1000 étudiants, la Bibliothèque conservait 300 000 volumes

  • 225 000 volumes ou brochures
  • 56 manuscrits
  • 650 périodiques

Sans compter les bibliothèques de 3 sociétés savantes locales, en dépôt à la bibliothèque universitaire, la  :

« Mademoiselle Dupasquier »

De Madeleine Dupasquier, bibliothécaire à la Bibliothèque de l’Université de Caen depuis 1940 sous la responsabilité de Claude Vacher de Lapouge suspendu en 1944, puis elle-même responsable à partir de 1944, on connaît peu de chose. Celle-ci apparaît à travers les récits de son action après l’anéantissement de la ville, de l’université et de la bibliothèque dans la nuit du 7 juillet 1944 et dans quelques témoignages.

« Les évènements de 1944 avaient soudain placé une jeune bibliothécaire-adjointe en face de graves responsabilités. La manière dont elle s’est muée instantanément en Chef de service de haut vol a fait de la Bibliothèque universitaire de Caen la Bibliothèque-pilote dans la mutation d’un monde nouveau. »

Lettre d’André Masson à Mademoiselle Dupasquier en réponse à une lettre de celle-ci.. Cette lettre a été communiquée à Mademoiselle de Suin, Bibliothécaire de la Bibliothèque universitaire par la sœur de Mademoiselle Dupasquier

« Isolée de Caen au dernier Week End qui coïncide avec le débarquement, mon retour date de la mi août, dès que je pus obtenir un permis de circuler et que l’hôpital provisoire ou nous avons soigné les premiers blessés à Bayeux, fut fermé »

 Madeleine Dupasquier. – Dossier adressé le 29 février 1956 à l’Inspecteur général (André) Masson par le Conservateur de la Bibliothèque universitaire de Caen

« Mais les résultats obtenus à la Bibliothèque universitaire de Caen ne l’auraient pas étés si la bibliothécaire, promue par les circonstances de guerre à un rôle exceptionnellement difficile, n’avait fait preuve d’un sens de l’organisation tout à fait remarquable, aussi bien pour tirer parti au début de ressources précaires, que pour gérer par la suite des fonds considérables. D’abord requise comme infirmière à Bayeux, lors du débarquement, c’est à la mi-août 1944 que Mlle Dupasquier put rejoindre son poste.

Sur l’emplacement de l’ancienne bibliothèque, elle ne trouve que des ruines. Pas un livre, pas une fiche, pas une pièce d’archives ».

André Masson, Inspecteur général des bibliothèques de France. – .La résurrection de la bibliothèque universitaire de Caen, Bulletin des bibliothèques de France n°6 Juin 1956 p. 415-419

« Madeleine Dupasquier, alors bibliothécaire adjointe, devint bibliothécaire en chef le 17 avril 1946. C’est elle qui fut appelée à faire renaître notre Bibliothèque. Tous ceux qui l’on connue ne peuvent l’oublier. Il a fallu qu’elle possédât des qualités vraiment exceptionnelles pour venir à bout des difficultés qui l’étaient tout autant.

Elle sut faire preuve d’un sens de l’organisation tout à fait remarquable, réussissant à tirer le meilleur parti de ressources extrêmement précaires, et, plus tard à gérer des fonds considérables.

C’était une personne de caractère qui savait imposer ses idées à ceux qui ne les partageaient pas de prime abord. Et cela, sans éclat, par une persuasion tenace.

Blonde, toujours souriante, très élégamment vêtue, un éternel châle jeté négligemment sur les épaules lorsqu’elle circulait à l’intérieur des bâtiments et qui était remplacé par une cape noire lorsqu’elle devait sortir, c’était une grande dame. C’était comme l’appelaient tous ceux qui travaillaient avec elle, « Mademoiselle ».

Requise comme infirmière à Bayeux juste après la Libération, elle ne revint à Caen qu’à la mi-août 1944 pour rejoindre son poste, mais, comme elle le disait, un poste où il n’y avait plus rien. Plus un livre ! Plus une fiche ! Plus une pièce d’archives ! »

Jean Collin – André Heintz : La vie quotidienne des étudiants à Caen de 1939 à 1955 ; préf. de Jean-Marie Girault. Caen : Presses universitaires de Caen, 1944 – Fonds normand : N RB II j 502385

« Puis vers Caen. Pauvre Caen. Je savais que l’université avait été détruite, et je me suis mis en contact avec la bibliothécaire, Mademoiselle Dupasquier, toujours en pleine forme, et qui était à l’époque une jeune blonde ravissante, et elle nous invita à prendre le thé. Je lui demandai combien de volumes avaient survécu dans les ruines de la bibliothèque, et elle répondit « un seul. » Sur ce, je proposai de lui envoyer tous les doubles de ma collection Voltaire ; ce fut le début de la collection de livres rares de la nouvelle bibliothèque. Voilà tout ce que j’avais prévu de faire, mais comme une mauvaise herbe le projet poussait, et je me suis découvert une nouvelle passion de collectionneur de livres français rares chez les libraires d’occasion – on n’appréciait guère ce genre de livre à l’époque, mais les choses ont bien changé depuis – et je me mis à lui envoyer des paquets. Cela allait produire un résultat dont je n’avais jamais rêvé. »

Desmond Flower. – Felows in follscap : memoirs of a publisher. London : Robert Hale, 1991. – B.U. BCEP : 181694 (Traduction Andrew Ives)

La reconstruction

L’université aurait pu revivre dans les bâtiments de l’Abbaye aux Hommes ou près de la Prairie, entre le stade Hélitas et le Bon Sauveur (c’était le vœu du maire Yves Guillou). Mais c’est au nord du château que travaille Henry Bernard. Ce dernier est premier grand prix de Rome, architecte de la Maison de la Radio à Paris et de l’église Saint Julien à Caen mais aussi élève de Paul Bigot, auteur de la maquette du plan de Rome. Assisté de l’architecte Edouard Hur, il crée une université délibérément monumentale, selon ses propres termes :

« Voilà donc une réalisation gigantesque, monumentale… »

Henry Bernard

Henry Bernard conçoit la Bibliothèque comme une « sorte de donjon en longueur », percé de multiples petites fenêtres qui tamisent la lumière pour protéger papiers et reliures : soit 8 niveaux de magasins à livres d’une capacité de 40 kilomètres de rayonnage pour 1 200 000 volumes.

Autour du « donjon », s’ articule une salle de lecture de 170 places, vaste et lumineuse grâce à sa paroi Est entièrement vitrée, au-dessous de la Salle des Périodiques.

Vaste chantier dont les étudiants ne se privent pas de brocarder l’apparente lenteur !

« Si vous espérez vivre entre ces beaux murs

Prenez votre temps.

Si vous comptez être au nombre des étudiants de cette Université modèle

Ne mettez pas les bouchées doubles

FAITES COMME LA RECONSTRUCTION ! »

Journal étudiant « Le Can-Can », 1952

Enfin en 1954, (10ème anniversaire du sinistre), les quelques 300 000 volumes et 1 150 périodiques (reçus ou acquis en l’espace de 10 ans seulement !) , convoyés par les camions de l’armée de l’air basée à Carpiquet, quittent la Rue Caponière pour emménager dans leur Bibliothèque actuelle.

« La Bataille des locaux »

Début septembre 1944, deux mois après sa destruction complète, la bibliothèque commence à se relever. Madeleine Dupasquier, à la demande d’André Masson, inspecteur général des bibliothèques, relate cette première année qu’il nommera « la période  héroïque ».

« Don d’une vingtaine de volumes [Les incunables au sens étymologique, de la nouvelle bibliothèque, dira A. Masson] offerts par la femme d’un médecin de Caen, mort en déportation, le Dr. Desbouis.

Ce furent bien les premiers (…)

Ils furent mélancoliquement déposés dans l’infirmerie de l’Ecole Normale [Rue Caponnière] à peu près close (nous n’avions encore aucun local), ce qui nous permit, à l’instar des précautions prises par nombre d’universitaires en quête d’un toit et d’une couverture, ce pompeux écriteau :« BIBLIOTHEQUE – Réservé ».

La BATAILLE des LOCAUX allait en effet commencer.

Grosses difficultés, mais là comme dans tous les domaines, une grande gentillesse de tous.

Pour le Service, on offre tout naturellement la salle de l’ancienne Bibliothèque de l’Ecole Normale au 3ème : salle moyenne mais sans dégagement. Impossibilité par conséquent et on le comprend : nous obtenons les deux salles que vous avez connues au rez de chaussée, dont l’une en amphithéâtre. Ce fut tout au départ.

Opinion générale : nous sommes bien servis.

Pour moi c’était maigre, mais l’intérêt du local, (en dehors de son emplacement central) apparaissait surtout pas ses possibilités d’extension : voisinage du hall d’entrée pouvant faire une bonne salle de lecture, du bar à gauche, des larges couloirs de façade – percée possible aussi vers des sous-sols solides et sains ; d’où le plan d’extension.

Réalisation difficile :

Premier temps : le bar et les petites salles avoisinantes.

L’Association Générale des Etudiants y a jeté son dévolu pour un foyer ; A ce moment période d’interrègne : pas de Recteur. Le Doyen des Sciences, M. Blanc maintenant décédé en fait fonction. … « Arrangez-vous avec les étudiants ». Les rois de la situation alors et ils le méritaient bien ! – Les équipes d’urgence pendant les bombardements furent braves. –

Leur gentillesse : moyennant l’abandon de quelques petites tables perdues dans les salles et trois mots de circonstance, ils acceptent d’installer leur foyer dans un sous-sol en attendant un baraquement.

Deuxième temps : le Hall et les couloirs

Plus difficile et pourtant s’ils nous furent utiles ! Il fallait dévier la circulation vers les ailes ; (…)

Relier les parties droite et gauche du local à travers le hall limité par une demi cloison et qui deviendrait ainsi un magasin… ouvert à tous vents ! La solution ne pouvait nous intéresser, ni être acceptée.

Ce fut la grande bataille du moment !

En fin de compte, compréhension du Recteur qui accepte, moyennant l’autorisation préfectorale, de nous laisser transformer en perrons d’accès, les deux dernières fenêtres du couloir.

Autorisation obtenue ; Ce qui n’empêcha pas pourtant un jeune scribe passant par là et ne nous croyant pas en règle avec le département, de vouloir faire un beau jour arrêter les travaux !

J’ai de tout cela maintenant, un souvenir mouvementé et un regard un peu amusé.

(…) La fin de nos annexions fut celle du grand préau dont vous vous souvenez, et vous savez ma gratitude à l’Inspecteur Général qui m’aida à obtenir le va et vient électrique sans lequel son utilisation eut été bien difficile.

Je signale d’ailleurs mon mérite d’être restée digne malgré les plaisanteries de la maison sur mon petit Chemin de fer. Je regrette même la panoplie de chef de gare que le Recteur voulut un jour m’envoyer et de n’avoir pu distribuer les aller et retour que le Professeurs tenaient absolument à se voir délivrer. (de temps en temps nous fûmes très gais). »

Madeleine Dupasquier. – Dossier adressé le 29 février 1956 à l’Inspecteur général (André) Masson par le Conservateur de la Bibliothèque universitaire de Caen

La bibliothèque de la Sorbonne et Jean Bonnerot : des livres, des fiches et des camions

En raison des difficultés de communication entre Caen et le reste du pays, à partir de l’automne 1944, c’est la bibliothèque de la Sorbonne qui centralise l’aide française et étrangère. Sous l’impulsion de Jean Bonnerot, une équipe de volontaires y accomplit tout le travail préparatoire à l’acheminement :

«(…) période héroïque 1944/1945 ou notre Bibliothèque put renaître grâce à l’inlassable dévouement de la Bibliothèque de la Sorbonne qui sous la généreuse impulsion de Monsieur Bonnerot procurait le matériel, centralisait même les opérations de classement (…)»

Année 1945/1946 – Rapport

« Par suite des opérations militaires, Caen reste pendant des semaines « coupé » du reste de la France ; les ponts ont sauté, aucune communication n’est possible par le chemin de fer. Seuls quelques camions parviennent à assurer pour la vie civile la liaison avec Paris.

Mais l’Université veut reprendre sa vie, la Bibliothèque veut renaître et c’est à Paris ou plus exactement dans les locaux de l’Université de Paris, à la Sorbonne que va, en quelques mois, grâce au dévouement de tous, s’opérer la reconstitution de la bibliothèque anéantie, avant même l’appel du ministre de l’Education nationale, [René Capitant] qui est daté du 25 septembre 1944.(…)»

Des livres…

« Des ballots de livres commencent à être entreposés à la Sorbonne en octobre 1944, donnés par des particuliers ou des sociétés. Des crédits exceptionnels sont accordés pour l’achat de livres essentiels et des grandes collections scientifiques.

Si quelques rayonnages de fortune commençaient à s’y installer, le bibliothécaire – dans une région où tout est détruit et où l’on ne trouve rien – ne pouvait se procurer ni registre pour l’inscription des livres, ni fiches de catalogue, ni meubles pour les classer.

Il fallait de toute urgence lui trouver la matériel de bureau nécessaire : papier à en-tête, cachets, étiquettes, machine à écrire, classeurs, dossiers, crayons, porte-plumes, etc… et le mobilier indispensable

(…)Le matériel, tables et fichiers, fut fait plus tard par le menuisier de la Sorbonne et c’est encore elle qui nous procurait le minimum de matériel de bureau introuvable ici – (presque des bassesses pour qu’une imprimerie accepte de nous céder un peu de carton à fiches)

L’article dont vous me parlez fait longuement état de ce dévouement de la Bibliothèque qui nous avait adoptés, et de son Conservateur [Jean Bonnerot, éditeur de la Correspondance de Sainte-Beuve]; Je ne peux aujourd’hui qu’insister à nouveau sur notre dette ! (…)»

Madeleine Dupasquier :1ère période de sa reconstitution. Dossier adressé le 29 février 1956 à l’Inspecteur général André Masson par le Conservateur de la Bibliothèque universitaire de Caen

Des fiches…

« Il fallait que les livres fussent exactement prêts à être mis en service, c’est-à- dire inscrits au registre d’entrée (…), estampillés (pour attester de la propriété de l’Université et éviter les pertes) et classés avec les fiches correspondantes , auteurs et sujets, qui constitueront le catalogue :opérations minutieuses sans lesquelles la bibliothèque renaissante eut été dès le début vouée au désordre.

Enfin comme il eût été imprudent de laisser partir des fascicules d’un ouvrage en livraison ou des périodiques : les uns et les autres ont été reliés avant leur envoi. »

Madeleine Dupasquier : Historique de la Bibliothèque universitaire de Caen, Bulletin du Bibliophile – Juillet 1947 – pp. 336-348

« Les deux premières factures régulières de livres étaient expédiées à la comptabilité du ministère le 12 octobre 1944 et quelques jours plus tard, le premier camion apportait à la bibliothèque de Caen le premier lot de livre étiquetés et classés avec quelques fiches correspondantes rédigées.

Peu à peu un service régulier s’établit et chaque quinzaine parfois chaque semaine un camion apporte à la bibliothèque normande son lot de livres. »

Madeleine Dupasquier : Historique de la Bibliothèque universitaire de Caen, Bulletin du Bibliophile – Juillet 1947 – pp. 336-348

Des camions…

« L’acheminement sur Caen fut d’ailleurs souvent des plus pittoresques : Nécessité d’être à l’affût d’un camion en partance – Interminables débats et invraisemblables voyages !

Le premier de tous : départ à 7 heures du matin, arrivée à l’Etoile à 10 heures du soir ! (malgré les innombrables arrêts par les F.F.I., je n’arrive plus à comprendre) – Camion à peine bâché… couvertures, pliants, bouillottes. Quel équipage !

Nous fîmes sourire en arrivant mais que tous ces passants soignés et ce papillotement de lumières nous semblèrent chose admirable !

(…) Impossible de tout emmener ; Celui-là ! Encore celui-là ! criaient les collègues de la Sorbonne, mais le dernier paquet fit une voltige de retour ; notre chauffeur était mécontent ! et je fus grande responsable de la panne de retour.

La camionnette de l’Ecole Normale Supérieure fit aussi quelques voyages : les doubles de l’Ecole, d’autres dons, des envois de la Sorbonne et en repartant, suis-je mauvaise langue ! un bon lest de beurre et de fromages normands !

Des services réguliers par camions s’organisèrent peu à peu – les déchargements aussi ou les livres s’entassaient en vrac dans le premier magasin ! »

Dossier adressé le 29 février 1956 à l’Inspecteur général (André) Masson par le Conservateur de la Bibliothèque universitaire de Caen (Madeleine Dupasquier) :1ère période de sa reconstitution

Les dons étrangers

Dès 1944, des appels aux dons sont lancés pour reconstituer les collections détruites à Caen. Partout dans le monde se constituent des comités, des associations qui commencent à collecter et à expédier des ouvrages.
Madeleine Dupasquier signala plus d’une centaine d’associations et de comités dans la liste « Liste des principaux donateurs » qu’elle rédigea.

« Le 1er septembre 1944, sur l’initiative du Professeur John Orr, [professeur de français à l’université d’Edinburgh] accompagné du Colonel Usher, un appel est lancé à la population et à l’Université d’Edimbourg

Une association est aussitôt fondée à Edimbourg, c’est : Edinburgh – Caen fellowship (Amicale Caen – Edimbourg). Lausanne devient aussi l’un des premiers « parrains »

La Bibliothèque leur est redevable de milliers d’ouvrages, certains introuvables en France ».

« Aux Etats-Unis, le Comité Horatio Smith de Columbia University à New York crée le « Comité Américain pour la Bibliothèque de l’Université de Caen » qui se fixe la tâche de réunir 100.000 livres et 100.000 dollars. Un premier envoi groupant 24 caisses nous parvient bientôt, hélas, suivi de l’annonce de la mort en septembre 1946 de ce généreux donateurs. » 

« Le Canada délègue ses plus éminents représentants pour apporter son soutien à notre Université et renouer les relations culturelles qui existaient avant guerre. C’est pourquoi, en 1946, lors de la rentrée solennelle de l’Université, Monsieur Thibaudeau-Rinfret, juge en chef du Canada et président du « Comité Canadien pour la Bibliothèque Universitaire de Caen », accompagné de Monsieur Gagnon, Ministre des Finances de la Province du Québec, sont faits Docteur « Honoris Causa » en témoignage de gratitude pour leur inlassable activité en faveur de notre Université

«  Les Universités anglaises et le British Council nous enrichissent d’ouvrages précieux et la Bibliothèque s’enorgueillit encore de mettre à la disposition de ses chercheurs quelques collections de chroniques anciennes portant « ex-libris » de la Chambre des communes qui nous furent expédiées par son speaker. »

« La Belgique crée un « Comité Belge pour la Résurrection de l’Université de Caen ». En moins de deux mois une campagne de souscription, qui s’est étendue jusqu’au Congo Belge a rapporté la somme de 500.000 francs belges ; et une grande quantité d’ouvrages de toute nature à la Bibliothèque Universitaire. »

« Les Pays Nordiques achètent de grandes séries d’ouvrages savants et leurs sociétés font l’envoi gratuit de leurs publications »

Madeleine Dupasquier La Bibliothèque Universitaire de Caen. Le Bulletin du Bibliophile. Juillet 1947 (Texte d’une affiche écrite par Madeleine Dupasquier)

Un aspect peu connu de la reconstitution des fonds : les achats de bibliothèques privées

Parallèlement aux dons, les collections sont reconstituées à partir de rachats de collections de particuliers. Enseignants ou érudits, ceux-ci cèdent à la bibliothèque à un prix avantageux les collections de livres qu’ils ont constituées au fur et à mesure de leurs propres travaux de recherche.

« Nos achats étaient en effet immenses et nous ne saurions passer sous silence un domaine d’enrichissement précieux entre tous qui nous fait mentionner, (…) les noms de nombreux savants et de spécialistes.

Ils nous cédèrent en effet à des conditions particulièrement avantageuses, des Bibliothèques patiemment constituées pour leur recherche personnelle et ils le firent avec tant de gentillesse et de dévouement, qu’eux aussi sont nos bienfaiteurs.

Dans ces attributions, la part de Caen est importante et elle bénéficie dès 1945 et au cours des années suivantes, de bibliothèques privées de haute valeur scientifique, achetées par la Direction des Bibliothèques à son intention :

le fonds byzantin de Charles Diehl, [Professeur d’histoire byzantine à la Sorbonne
les travaux de critique littéraire réunis par Abel Lefranc, [Professeur au Collège de France, spécialiste de la littérature du XVIième siècle]
les livres d’art d’Etienne Michon [Historien de l’art]
et les ouvrages d’orientalisme de Charles Autran.

Et aussi les bibliothèques de Pierre Caron, Archiviste paléographe, Alfred Coville, Historien, Floris Delattre, Professeur de langue et littérature anglaise à la Sorbonne, Léopold Dor, Bibliothèque juridique de droit international, Henri Hauser, Professeur d’histoire économique, Fernand Mossé, Professeur au Collège de France, germaniste, spécialiste du vieil allemand Nicolas Politis, Diplomate, Bibliothèque de droit international, Henry Rollin, Historien, Louis Rougier, Professeur de philosophie, Paul Verrier, Professeur à la Faculté des Lettres de Paris.»

Madeleine Dupasquier. Bibliothèque de l’Université de Caen 1944-1957 : La Reconstitution

La bibliothèque acquiert également un fonds particulier sur l’histoire de l’édition et les arts graphiques qui la met au niveau de “La Bibliographie de la Réserve Nationale” disait un jour avec satisfaction le Directeur des Bibliothèques de France [Julien Cain]”.
Cet ensemble a été conservé en tant que tel et enrichi : il est toujours accessible pour les lecteurs et habille élégamment les murs du bureau du directeur.

Des exceptions : le fonds protestant et le fonds Abel Bonnard

Deux fonds présents dans les collections de la bibliothèque universitaire, ne sont pas issus de dons ou d’achats de bibliothèques.

Le fonds protestant

En 1945400 volumes ont miraculeusement été retrouvés parmi les décombres du temple protestant situé à l’époque rue de Geôle, dans les dépendances de l’ancien monastère des bénédictines. 

En dépôt depuis 1965 à la bibliothèque universitaire dans le cadre d’une convention passée avec l’Eglise réformée de Caen, cet ensemble d’ouvrages (16e-19e siècles) comporte notamment des oeuvres de Calvin, de Philippe de Mornay (1549-1623, théologien réformé ami d’Henri IV) et de pasteurs Caennais comme Pierre Du Bosc (1623-1692).

Le fonds Abel Bonnard

Abel Bonnard fut à la fois poète, romancier et homme politique. Il évolua très tôt vers l’extrême droite et devint ministre de l’éducation nationale sous le régime de Vichy. Après avoir fui à Sigmaringen en 1944 puis en Espagne en 1945, il est condamné à mort par contumace pour fait de collaboration. La plus grande partie de sa bibliothèque a été confiée à la bibliothèque universitaire en 1947. Jugé à nouveau en 1960 et condamné à 10 ans de bannissement avec effet à partir de 1945, Abel Bonnard choisit de céder sa collection d’ouvrages à l’Etat contre une indemnisation. Environ 12 000 volumes, dont 2500 conservés à la réserve, témoignent de sa curiosité, de sa culture et de son goût pour les voyages. On y trouve des ouvrages sur l’histoire, la littérature, les beaux-arts, de nombreux récits de voyage, des guides anciens de villes (ancêtres des guides touristiques) parfois richement illustrés.

Convention du 5 octobre 1961 entre le Ministère de l’Education Nationale et M. Abel Bonnard :
« […] Article 1er. – M. Abel Bonnard déclare céder à l’Etat (Ministère de l’Education Nationale – Direction des Bibliothèques de France) les ouvrages et collections constituant sa bibliothèque personnelle […]
[…] Article 2. – Les ouvrages et collections qui font l’objet de la présente cession sont estimés à la somme de 49 955 NF […] Cette somme sera versée à M. Abel Bonnard en deux fractions. »

Les principaux donateurs

La Bibliothèque se reconstitue…

« À la fin du mois de novembre 1945, c’est à dire un an après la reprise des cours, Madeleine Dupasquier était très fière d’annoncer au recteur qu’en douze mois, elle avait acquis 13 000 livres et qu’on lui en avait offert 3 000 ; On était encore loin des 350 000 livres d’avant guerre. (…)En 1947, 90 000 livres reposaient sur plus de deux kilomètres de rayons. »

Jean Collin – André Heintz : La vie quotidienne des étudiants à Caen de 1939 à 1955 ; préf. de Jean-Marie Girault. Caen : Presses universitaires de Caen, 1944 – Fonds normand : N RB II j 502385

Madeleine Dupasquier dans le seul document que possède la Bibliothèque Universitaire, indiqua près de 200 donateurs, principaux, privés, français et étrangers. Desmond Flower, Bernard Drzewieski, André Corbeau sont considérés comme les plus importants.

Un donateur héroïque et généreux : Desmond Flower

Directeur littéraire des éditions britanniques Cassell et bibliophile, Desmond Flower participa à la Bataille de Caen au cours de la Campagne de Normandie de 1944. Il fut particulièrement ému par le sort de l’Université et de sa bibliothèque. Sa rencontre avec Madeleine Dupasquier le détermina à faire don à la bibliothèque universitaire des doubles de sa collection « Voltaire » d’ouvrages rares des 17e et 18e siècles.
Plus de 500 volumes, dont le catalogue manuscrit de l’ensemble de la collection, furent envoyés. Conservés à la Réserve, ils comportent parfois les annotations discrètes au crayon à mine de Flower lui-même : indications de rareté ou de 1ère édition, références bibliographiques, etc. ; ainsi qu’un ex-libris gravé sur bois par l’artiste londonien Eric Gill (1882-1940) : une tête de lion avec la devise « Sola Deus Salus ».
Après son divorce en 1972, il dut vendre l’autre partie de sa bibliothèque qui est désormais conservée à l’Université du Texas à Austin.

« […] je lui [Madeleine Dupasquier] proposai de lui envoyer tous les doubles de ma collection Voltaire ; ce fut le début de la collection de livres rares de la nouvelle bibliothèque. Voilà tout ce que j’avais prévu de faire, mais comme une mauvaise herbe le projet poussait, et je me suis découvert une nouvelle passion de collectionneur de livres français rares chez les libraires d’occasion – on n’appréciait guère ce genre de livre à l’époque, mais les choses ont bien changé depuis – et je me mis à lui envoyer des paquets. Cela allait produire un résultat dont je n’avais jamais rêvé. »

Desmond Flower. – Fellows in follscap : memoirs of a publisher. London : Robert Hale, 1991. – B.U. BCEP : 181694. (Traduction Andrew Ives

Un artisan de la Reconstruction : Bernard Drzewieski

Bernard Drzewieski est né à Lublin (Pologne) en août 1888. Après des études à l’Université de Paris et celle de Genève, il occupe jusqu’en 1939 plusieurs fonctions importantes dans le domaine de l’éducation en Pologne. Devant l’invasion allemande, il fuit d’abord en Roumanie, puis en France et enfin suite à l’occupation, part pour Londres où il s’investit, entre autres, dans des institutions à caractère international œuvrant pour l’éducation des peuples : Conseil pour l’Instruction Civique Internationale, Comité Exécutif de la Commission préparatoire de l’Unesco et enfin Directeur du Département de la Reconstruction à l’Unesco. Il meurt le 13 août 1953.

Archives de l’UNESCO, AG 14, Dossier biographique Drzewieski

« Madame Drzewieska, veuve du Professeur Bernard Drzewieski, (…), exécuta le vœu de ce dernier de voir sa Bibliothèque entre les mains de la jeunesse universitaire.

La Bibliothèque offerte, importante tant par le nombre de volumes qu’elle représente (environ 8000 volumes) que par leur qualité, est celle d’un érudit largement intéressé par les questions économiques et sociales, mais essentiellement attiré par l’étude de toutes les formes et manifestations d’art. Ses collections réunies dans notre fonds d’Histoire de l’Art, l’enrichissent de très beaux volumes de critique et de reproductions. »

Madeleine Dupasquier. Bibliothèque de l’Université de Caen 1944-1957 : La Reconstitution

André Corbeau et la « Bibliotheca Corvina de Vincianis »

Il ne fut pas l’un des donateurs de l’immédiat après-guerre.
Cependant en raison des ses liens avec les recteurs Daure et Martin et de sa présence sur la «Liste des donateurs » de Madeleine Dupasquier on peut le considérer comme l’ultime donateur lié à la Reconstitution de la Bibliothèque Universitaire.

Son amitié avec le recteur Martin se traduisit par la donation à l’Université de Caen de la Bulle Quoniam en 1958 (bulle confirmant la refondation de l’université en 1452 par le Pape Nicolas V) et le don de sa bibliothèque consacrée à Léonard de Vinci. La Bibliothèque Universitaire hérita ainsi d’un « trésor scientifique» de plus de 500 titres
Sa sœur Nelly exécuta son vœu et fut elle-même donatrice d’ouvrages anciens et rares.

Carlo Pedretti, spécialiste vincien disait en 1996 : « Le fonds Corbeau fait de Caen, de son université et de sa bibliothèque universitaire, le troisième centre léonardien après ceux des villes de Vinci et de Florence, riche de ressources inexistantes ailleurs ».

On peut aussi citer Madame Joannidès qui fit don de la bibliothèque de son mari Alexandre de « beaux livres précieux » sur le théâtre et la Comédie française, Yves Bargeon qui donna ses ouvrages sur l’histoire de la musique, les héritiers de Monsieur Bonjean des ouvrages de droit , le Commandant Pierre Pannetier 2500 ouvrages « soigneusement et joliment reliés », Monsieur Lafond des ouvrages sur la Guerre 1914-1918…
Mais en consultant les registres d’inventaires on peut aussi constater que plusieurs centaines de donateurs, venant de la région ou du monde entier offrirent bien souvent un seul ouvrage neuf ou ancien. Ainsi P.-Louis Rivière de Rots, Calvados, Indira Sarkar de Calcutta, Albert Caraco de Montevideo, Marie Agnès Strukelj, étudiante étrangère, Monsieur Skolimowski, etc…
Madeleine Dupasquier leur rendit ainsi hommage : « Les inventaires de la Bibliothèque où s’inscrivent jour après jour, les livres parvenus de tous les points du monde, gardent le plus noble témoignage de cette entraide généreuse ».

En 1955 la nouvelle bibliothèque était ouverte à ses lecteurs et offrait aux 3.550 étudiants300.000 volumes.

En 1956, André Masson écrivit : « La bibliothèque de Caen est aujourd’hui la plus spacieuse et l’une des mieux organisées des bibliothèques universitaires de province »….

On fête l’inauguration de l’université et de la plus grande Bibliothèque Universitaire de province

« La bibliothèque de Caen est aujourd’hui la plus spacieuse et l’une des mieux organisées des bibliothèques universitaires de province. Les larges crédits dont elle dispose pour ses achats de livres lui permettent non seulement de reconstituer méthodiquement livres de base et collections de périodiques, mais encore de réserver une part importante à des acquisitions orientées dans le sens de la spécialisation anglo-saxonne de l’Université de Caen… » 

André Masson, Inspecteur général des Bibliothèques « La Résurrection de la Bibliothèque universitaire de Caen », Bulletin des Bibliothèques de France, 1956

 Apothéose de cette « Résurrection» : 1 et 2 juin 1957, les fêtes de l’inauguration d’une extrême solennité :

« L’inauguration officielle des nouveaux locaux de l’Université […] restera l’événement mémorable. Il suffira de se rappeler les grandioses manifestations de juin 1957 ; la présence à ces cérémonies de S. M. la Reine Elisabeth de Belgique, de nombreuses personnalités du monde politique, militaire, administratif, des délégués de cent cinquante universités françaises et étrangères, était le témoignage de l’intérêt qu’avait suscité la renaissance de notre Université. »

Rapports annuels du Conseil de l’Université , années 1955-1956 et 1956-1957

Au milieu de ces festivités spectaculaires : remise de 18 diplômes de docteurs « Honoris causa », défilé coloré des professeurs revêtus de leur toge ou garden party au Jardin des Plantes… , deux cérémonies symbolisent plus particulièrement la renaissance de la Bibliothèque :

  • La Remise de la Croix de chevalier de la légion d’honneur à Madeleine Dupasquier , conservateur de la Bibliothèque, par Jean Sarrailh, recteur de l’Université de Paris.
  • À la Bibliothèque, la visite d’une exposition de documents (dont les Chartes de fondation anglaise et française de l’Université ), par les personnalités (Reine Elisabeth de Belgique, l’architecte Henry Bernard, le recteur Pierre Daure…,) acteurs, à titres divers, de sa Reconstruction.
Grande salle de lecture de la BU en 1957