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Myriam Abioui-Mourgues, post-doctorante en neurosciences au laboratoire PHIND

Myriam Abioui-Mourgues : « développer des modèles d’AVC au plus près de la réalité clinique »

Avec 150 000 nouveaux cas chaque année en France, l’accident vasculaire cérébral (AVC) est la première cause de handicap acquis chez l’adulte. Myriam Abioui-Mourgues, post-doctorante en neurosciences, étudie les mécanismes de l’AVC pour faire avancer le diagnostic et le traitement de cette pathologie.

Quels sont les enjeux de vos recherches sur l’AVC ?

L’accident vasculaire survient lorsque la circulation sanguine est brutalement interrompue dans le cerveau. Dans la grande majorité des cas, l’AVC est dû à un caillot qui obstrue une artère cérébrale, privant le cerveau d’oxygène. Chaque minute compte : la prise en charge doit être immédiate pour limiter les séquelles. Ce qui m’intéresse, c’est la physiopathologie de l’AVC – à savoir les mécanismes biologiques qui perturbent la circulation sanguine et qui induisent la survenue d’un accident vasculaire cérébral. Que se passe-t-il dans notre cerveau ? L’AVC, c’est d’ailleurs l’un des principaux axes de recherche du laboratoire PHIND et de l’institut BB@C. Pour mieux comprendre ces dérèglements, mes recherches se concentrent sur la phase préclinique, chez la souris – qui reste le modèle animal le plus étudié avant toute investigation chez l’Homme. Concrètement, nous induisons un caillot sanguin dans une artère cérébrale pour provoquer un AVC et ainsi observer les mécanismes en jeu.

Quelles sont les approches que vous explorez ?

J’ai suivi toutes mes études à l’université de Caen Normandie, avant de m’orienter vers un doctorat en neurosciences, au laboratoire PHIND. Mes travaux de thèse portaient sur une problématique rencontrée en préclinique chez l’animal : l’impact de l’anesthésie générale. Le recours aux animaux à des fins de recherche est strictement encadré, ce qui implique notamment l’utilisation d’anesthésiques pour limiter le stress. Or les produits anesthésiants ont des effets sur le métabolisme cérébral, ce qui affecte les résultats de nos expérimentations. La conséquence, c’est une difficulté à transposer les résultats : les traitements contre l’AVC jugés prometteurs chez la souris se révèlent inefficaces chez l’Homme lors des phases cliniques. Cette difficulté limite le développement de nouveaux traitements. L’enjeu consiste donc à développer un modèle d’AVC chez l’animal éveillé pour reproduire les mécanismes de l’AVC et éviter tous les biais. De fait, les patients se présentant aux urgences pour un AVC sont éveillés et leur prise en charge se fait également en état d’éveil. Il s’agit ainsi de se rapprocher, le plus possible, de la réalité clinique.

Vous poursuivez désormais cette voie en post-doctorat ?

Oui, mon post-doctorat s’inscrit dans la continuité de mes recherches. L’un des principaux enjeux de la recherche sur les AVC consiste à améliorer le diagnostic de la pathologie, pour bien localiser la zone d’obstruction de l’artère et l’étendue des atteintes. Je travaille sur une technique d’imagerie médicale par ultra-son (ULM, pour ultrasound localization microscopy) chez la souris éveillée, en collaboration avec le Laboratoire d’imagerie biomédicale (LIB) de Sorbonne Université. Cette technique permet de visualiser, en trois dimensions, le volume complet du flux sanguin cérébral, à une échelle fine de l’ordre de quelques dizaines de micromètres. La grande nouveauté, c’est le développement d’une plateforme en accès libre proposant l’ensemble des images, des données et des codes liés à cette technique d’imagerie, pour favoriser le partage des connaissances avec la communauté scientifique. Ces recherches ont fait l’objet d’un article publié dans Nature Communications Engineering, en juin 2025 – une belle reconnaissance pour nos travaux !

Chabouh, G., Denis, L., Abioui-Mourgues, M. et al. 3D transcranial ultrasound localization microscopy in awake mice: protocol and open-source pipeline. Commun Eng 4, 102 (2025). DOI

Ces recherches s’inscrivent dans le cadre du projet CaeSAR, qui bénéficie d’une aide de l’État gérée par l’Agence nationale de la recherche au titre de France 2030 portant la référence ANR-23-EXES-0001 et de la Région Normandie.