A la rencontre d’Olivier, géographe-climatologue, engagé pour éveiller les consciences

La Semaine européenne du développement durable bat son plein ! Pour ce second portrait, partez à la rencontre d’Olivier, géographe-climatologue, et membre du GIEC Normand.

Une multitude de casquettes mais un seul point commun : la climatologie

Olivier est géographe-climatologue depuis de nombreuses années. Après un parcours totalement orienté vers la climatologie, Olivier a effectué une grande partie de sa carrière professionnelle à l’Université de Caen Normandie, en enseignant au département de géographie et en conduisant des recherches dans le laboratoire de géographie physique et d’environnement, plus connu sous le nom d’IDEES-Caen.

Cet engouement pour la climatologie vient d’une « éducation marquée par le respect de l’environnement et de la paix sociale ». Issu d’une famille nombreuse, Olivier a compris qu’une « forme de développement durable à micro-échelle était nécessaire pour que chacun trouve sa place, même les plus petits, et puisse réaliser ses projets sur le long terme ».

L’Economie mondiale, carte issue de l’Atlas Général Bordas

Son intérêt pour la géographie est né grâce à la lecture des cartes à l’échelle de la planète, en particulier celle présente dans l’Atlas Général Bordas, représentant l’Economie mondiale superposant les productions mondiales et les milieux géographiques ».

« À partir des flèches et du grand tableau de données qui l’accompagnait, il était possible pour moi de voir qui produisait quoi, combien et où, ainsi que les échanges entre pays. » explique Olivier.

Olivier a ensuite parfait ses connaissances autour des ressources planétaires et leurs limites, ainsi que des problématiques liées à la croissance démographique et économique à travers le monde, grâce à la diversité des enseignements de géographie physique, humaine et économique suivis au cours de ses études.

Aujourd’hui, Olivier porte différentes casquettes. Côté recherche, il est directeur du laboratoire IDEES-Caen, président de la commission « Changements climatiques et territoires » du Centre National Français de Géographie (CNFG), porteur de l’item « Changement climatique et aléas météorologiques » pour le GIEC Normand et président du Conseil scientifique du Parc naturel régional Normandie-Maine. Côté pédagogie, Olivier est professeur des universités et responsable du Master GAED (Géographie, Aménagement, Environnement et Développement) et de son parcours ERDT (Environnement, Risques et Diagnostics Territoriaux).

Ses recherches actuelles sont axées sur le changement climatique et la climatologie urbaine. Olivier travaille avec des institutions publiques, comme la DREAL sur un Atlas du changement climatique en Normandie, ou la communauté de commune Caen la mer et la ville de Bayeux sur les ilots de chaleur urbain (ICU).

Un objectif : sensibiliser toujours plus de personnes

Olivier explique qu’être géographe-climatologue c’est être « à la croisée des sciences de la nature et des sciences humaines », et ainsi se rendre compte que le développement durable est partout. La communauté scientifique alerte depuis de nombreuses années sur la menace que représente le changement climatique d’origine anthropique, c’est-à-dire dû aux activités humaines, et sur la durabilité du modèle de développement actuel.

Olivier salue le travail accompli par l’université depuis plus de 10 ans, et la politique de développement durable adoptée. « Ce positionnement se traduit notamment par l’intégration dès cette année de la « transition écologique pour un développement soutenable » (TEDS) dans la formation de tous les étudiants de 1er cycle. » précise-t-il.

Cette intégration des enseignements tournés vers la transition écologique fait écho à son souhait de sensibiliser le public étudiant à travers ses enseignements. Cela s’est traduit par la création d’une UE dès la Licence 1 intitulée « Changements climatiques et dynamiques environnementales », ouverte également aux étudiants d’histoire et d’économie. Il intervient également auprès d’un public non-géographe, comme dans l’UE « Développement durable » du Master Développement Durable : Stratégies de Concertation et de Communication (DDSC) ou ponctuellement pour des étudiants en Sciences et des Grandes Écoles.

En dehors du cadre scientifique et universitaire, le résultat de ses recherches fait l’objet de présentations à destination des acteurs et décideurs de la sphère publique et privée, ainsi que des élus. « Les sollicitations sont très nombreuses, en écho à la plus forte lisibilité des travaux offerte par le GIEC Normand » précise-t-il. La communication auprès de la presse écrite et audiovisuelle est également une mission importante pour sensibiliser une plus large population aux problèmes actuels et évoquer les solutions possibles.

Un projet de recherche sur les ilots de chaleur urbain

L’idée d’un réseau de mesures sur l’agglomération caennaise est née de la volonté de savoir si le phénomène d’îlot de chaleur urbain (ICU) observé dans les très grandes agglomérations comme Paris, où Olivier a réalisé sa thèse, se retrouve dans des villes de taille moyenne, comme Caen. Les questions auxquelles ce projet doit répondre sont vastes : En quoi le phénomène est-il similaire ou différent dans sa forme, son intensité, sa durée, sa fréquence ? Comment cela peut-il affecter la santé et le bien-être de la population locale ? Quelles solutions proposer pour en limiter les effets néfastes ?

Une station météo est d’ailleurs installée sur le Campus 1, près de la MRSH. Vous souhaitez avoir accès aux données captées par la station météo en temps réel ?

Quelques visuels pour comprendre le projet

Après plus de 3 ans de mesures, la preuve a été faite de l’existence d’un ICU sur Caen dont les caractéristiques sont liées à la géographie du site, aux formes urbaines et à la nature des matériaux de construction qui composent l’agglomération, mais aussi à l’occurrence de types de temps favorables à sa formation. Plus le temps est clair et calme, et plus un fort ICU est observé, ce qui n’est pas le cas lorsque le temps est venteux et/ou nuageux.

En moyenne, l’écart journalier maximum entre le cœur de Caen et la Prairie est de l’ordre de 2°C mais il peut dépasser 4 à 6°C lorsque les conditions sont optimales, notamment en été, grâce à de plus longues périodes anticycloniques.

Aujourd’hui la quarantaine de stations réparties du centre-ville à la campagne permet de voir et quantifier l’influence de la vallée de l’Orne et de la Prairie pour fabriquer et faire rentrer de l’air frais dans la ville. Olivier et son équipe étudient notamment la circulation de l’air entre la campagne et la ville aboutissant au concept de « trame transparente », pour mettre en évidence la contribution des trames verte (végétation) et bleue (eau) dans le rafraichissement de l’air (îlots de fraîcheur et couloirs de fraîcheur).

En période de canicule, les préceptes du développement durable appliqués à l’échelle d’une ville, par le biais notamment des solutions fondées sur la nature, contribuent à un meilleur confort de vie pour les citadins. Alors que la nuit reste très chaude dans le cœur de ville (« nuit tropicale »), les secteurs sous le vent de la Prairie enregistrent des températures couramment de 4 à 6°C plus fraîches, facilitant les conditions de récupération physiologique et limitant de ce fait la vulnérabilité de la population face à ce type d’épisodes météorologiques extrêmes, dont la fréquence est amenée à se multiplier dans les prochaines décennies.

En tant que chercheur, Olivier accorde de l’importance sur la traduction concrète et utile des travaux au bénéfice de la société. Dans cette optique, depuis quelques années, il oriente ses contributions pour faciliter le passage de la connaissance scientifique à l’action territoriale. Pour ce faire, la « descente d’échelle » est une procédure de spatialisation permettant d’offrir une information géographique avec un grain suffisamment fin pour sensibiliser le public et les acteurs locaux au changement climatique, puis dynamiser et faciliter la mise en place de stratégies adaptées pour la préservation et le développement durable des territoires.

Un regard tourné vers l’avenir

Le projet de réseau de mesures sur l’agglomération caennaise a encore de belles années devant lui. La prochaine étape consiste à pouvoir mesurer les conséquences de la taille et de la position d’un espace vert ou d’une zone humide sur l’atténuation de l’ICU caennais. À terme, ces connaissances pourraient donner des informations utiles pour l’aménagement de la ville de demain répondant aux objectifs du développement durable, dans un contexte de réchauffement global, qui est, pour rappel, de plus 3 à 4°C en France à l’horizon 2100.

Outre ses actions dans le cadre de ses recherches, Olivier essaie d’agir au quotidien, en privilégiant la marche à pied ou le vélo pour ses déplacements courts, les transports collectifs pour les plus longs, et en réduisant sa consommation de carburant par une conduite adaptée, lorsqu’il est contraint d’utiliser sa voiture. Olivier a également procédé à des modifications dans ses habitudes de vie, en réduisant la consommation de viande et du chauffage, par exemple.

À l’échelle du laboratoire IDEES-Caen, les pratiques quotidiennes ont évolué, notamment dans la gestion de la lumière et des déchets. Désormais, les chercheurs sont invités à éteindre les lumières dès qu’ils sortent d’une salle, et à trier leurs déchets. L’empreinte carbone du laboratoire a également été calculé grâce au travail de la mission Campus 30.

Pour passer à l’action en faveur d’un développement durable, Olivier propose de transformer l’action en projet attractif, tout en veillant à ce que « les inégalités sociales se réduisent dans cette dynamique de transition ». Pour Olivier, « quelle que soit l’échelle d’observation et d’action, il est question de notre avenir à tous » en référence au titre officiel du Rapport Bruntland où apparait pour la première fois, en 1987, l’expression « Sustainable development » : « Our Common Future » (traduction : Développement soutenable : notre futur commun).

Pour Olivier, « chaque geste compte et il est encore temps d’agir. Et quoi qu’il arrive, ne jamais abandonner ! »

Pour toute question sur la politique de développement durable de l’université, contacter la mission Campus 30 à l’adresse campus30@unicaen.fr