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Pensées 1649 à 1653

M :Montesquieu 1726/1727-1755.
D :Bottereau-Duval 1718-1731.
E :1734-1739.
U :1739.
H :1741-1742.
J :1742.
K :1742-1743.
F :1743.
I :1743.
L :1743-1744.
O :1745-1747.
P :Damours 1748-1750.
Q :1750-1751.
R :Saint-Marc 1751-1754.
S :1754-1755.
V :1754.
JB :Jean-Baptiste Secondat ?-1795.
T :écriture des manchettes 1828-1835

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M : Montesquieu.
D : Bottereau-Duval_1721-1731.
H : 1741-1742.
P : Damours_1748-1750.
E : 1734-1739.
L : 1742-1744.
O : 1745-1747.
T : écriture des manchettes
JB : Jean-Baptiste_Secondat.
J : 1742.
K : 1742-1743.
F : 1743.
E2 :
I : 1743.
R : Saint-Marc_1751-1754.
Q : 1750-1751.
S : 1754-1755.
V : 1754.

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Pensées, volume III

1649

{f.8r} [Passage à la main P] Milord Bath[1] m’a dit que la depte de la nation en 1749[2] etoit de 81 milion sterling qui à 4 pour cent faisoit a peu a peu pres 4 millions de rente a paier, que le fond d’amortissement et la liste civile[3] faisoient a peu pres deux autres millions qu’il y avoit pour cela des fonds appropriés, parce qu’à mesure qu’on a fait des deptes on à etabli un fond pour les interests, et les interests ayant êté reduits on en à formé le fond d’amortissement qui par consequant à aussi des fonds appropriés[4]. La liste civile à aussi des fonds appropriés[5] et il n’est point besoin pour cela d’aucun acte du parlement n’y d’aucune levée sur le peuple, or pour les depenses extraordinaires comme pour l’entertien[6] des troupes qui sont des depenses extraordinaires, il y à des fonds qui s’appliquent comme le parlement veut et selon les circonstances, comme la taxe sur les terres plus grande ou moindre qui va à 500 mille livres sterling pour chaque chelin[7] pour livre, et un droit je crois sur la biere

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Passage de la main M à la main P

1650

Je vais donner des reflections sur les fonds d’amortissement. On vient de dire que les interests sont en Angleterre a 4 pour cent. Milord Bath[1] m’a dit qu’on pensoit {f.8v} en Angleterre a les reduire à trois et demi d’abord, et ensuite à trois, ce qui eleveroit le fond d’amortissement

Amortissement

a 2 millions, et fairoit qu’on pouroit paier la dette de la nation en un tems asses court a cause de l’interest, de l’interest[2]. Or j’examineray la question sçavoir qu’est-ce qui convienderoit[3] mieux de joindre ce million de diminution au fond d’amortissement, ou bien de diminuer d’autant les imposts qu’on leve sur le peuple, cella cela m’a fait faire des reflexions sur la nature des fonds d’amortissement.
Un fond d’amortissement n’est bon que quand il est eternel, il n’est eternel que lorsqu’il est perpetuelement appliqué, autrement c’est un fond d’amortissement qui n’amortit pas. Plus le gouvernement sera constant, plus le fond d’amortissement doit etre leger, parce que cinquante ans d’un gouvernement constant peuvent etre egaux a deux d’un gouvernement qui ne l’est pas. J’apele gouvernement constant celuy qui peut faire des operations constantes c’est a dire independantes de la mort d’un prince, ou de la chute d’un ministre. Un etat ne peut devoir que jusqu’a un certain point. Si l’etat aproche de ce point il est dans un grand danger parce que le moindre danger du gouvernement pouvant faire hauser l’interest de l’argent il n’emprunte que laborieusement, parce qu’il ne luy reste que peu de fonds a appliquer pour asseurer ses emprunts et que les anciennes dettes tombent de valeur ; il y a plus quand cet etat par de certains efforts pouroit augmanter un fond d’amortissement moderé il ne deveroit[4] pas le faire par la raison que faisant tout d’un coup un gros {f.9r} paiement il court risque d’obliger les sujets d’envoier leurs fonds dans les pays etrangers ou du moins de faire tomber le capital des fonds publiques que tout etat doit maintenir parce que c’est la richesse publique ; et quand un etat est arangé de maniere que les citoiens ont un certain nombre de fonds placés, il ne faut pas tout à coup laisser un grand nombre de particuliers à vuide. Si c’etoit cet etat par sa sagesse et son bon gouvernement trouve le moyen de diminuer l’interest de ses fonds publiques il ne faut pas augmanter son fond d’amortissement par laes raisons qu’on vient de dire, il vaut mieux qu’il emploie ce qui luy revient de l’interest des fonds publiques à diminuer les taxes d’autant, afin de soulager les terres le commerce, et l’industrie ; et diminuer la cherté des manufactures, et faire en sorte par la que les fonds publiques ne prennent pas trop de superiorité sur les fonds particuliers. D’un autre coté on peut pourvoir aux fonds publiques et en augmanter la confiance, en augmantant la confiance qu’il place dans son fond d’amortissement c’est en augmanter les effets, et on peut meme dire que c’est la meme chose que d’en augmanter le capital ; pour cela un etat pareil doit faire une loy bien simple, et c’est un crime de haute trahison d’appliquer le fond d’amortissement, à autre usage qu’aux ou de proposer de l’appliquer à autre usage qu’aux paiements des dettes publiques pour quelque cause que ce soit jusqu’à ce que l’enemi soit aux portes ; par ce moyen on peut oublier la dette et le fond d’amortissement en s’arangeant pour l’avenir sur les resources qui restent, parce qu’un etat {f.9v} qui n’a que certaines resources connues, s’arrange sur ses resources et que sachant qu’il ne peut toucher ny aux dettes ny au a leur fond d’amortissement, il se conduit comme aiant ce pouvoir de moins. Le reculement du paiement total des fonds publiques augmante de même dans ce cas la bonté et la valeur des fonds publiques moins la dette est sure par sa nature plus l’esperance de la promptitude du païement en augmante la valeur, plus elle est sure par sa nature plus l’esperance du païement en augmante la valeur.
Par la l’etat se liberera d’une maniere insensible a luy et ses creanciers il n’y aura aucune secousse, il renterera tous les ans dans le commerce une somme moderée ce qui sufira pour luy procurer de même un accroissement insensible, ce qui est peut etre mêlieur que les accroissemens rapides qu’il est tres souvent difficile de soutenir et qui font tomber des branches a mesure qu’elles en forment d’autres qui ne causent point la jalousie des nations et ne les avertissent pas, qui ne donnent point a un etat trop d’hardiesse et trop de confiance en ses propres forces qui ne luy font point faire de trop grandes entreprises, en un mot qui luy donnent de la santé et non pas trop d’enbonpoint en un mot qu’ils nourisent et ne l’enflent pas.
Un etat qui augmante peu a peu sa force est dans la

Etat

prosperité en comparaison de ceux qui conservent la leur comme ceux ci en comparaison de ceux qui la perdent
Un etat qui augmante tout à coup sa force {f.10r} est sujet à tous les inconveniens du changement de la fortune qui exige une infinité d’autres changemens, ces differents autres changemens d’autres principes, or comme la sagesse est une suite de principes que l’experiance a bien appliquée il est plus difficile à un etat qui augmante sa fortune rapidement de se conduire avec sagesse

Esp.

qu’à un etat qui augmente sa fortune insensiblement. Joignez a ceci d’autres reflexions qui sont dans ma liasse sur la nouvelle edition de l’Esprit des loix[5].

- - - - -

Main principale P

1651

Quand on considere les hommes de notre nation on est etonné de voir des gens qui ne se tiennent jamais pour ruinés, et qui ne se tiennent jamais pour enrichis, pour moy je m’estime heureux d’avoir… mille livres de rentes qui n’ont affaire a personne[1].

- - - - -

Main principale P

1652

Malheureuse condition des hommes, a peine l’esprit est-il parvenu au point de sa maturité, le corps commance a s’afoiblir

- - - - -

Main principale P

1653

Mon merite a percé disoit un homme qui s’etoit enrichi

Richesses

. J’ay fait plus d’amis depuis hier que je n’en avois fait en toute ma vie  ; comment se pouvoit-il que je fusse aussi meprisé que je l’etois il y à huit jours : il y à apparance que ce n’etoit pas ma faute ; c’etoit celle de ces gens obscurs, sans goust et sans education que je voiois pour lors, mais surement je renonceray a la mauvaise compagnie. Ou bien mais surement je ne les verray plus[1].

- - - - -

Main principale P


1649

n1.

Voir nº 1639, note 5.

1649

n2.

Cf. nº 17. Très attentif à cette question, Montesquieu notait dans le Spicilège l’état des dettes nationales de la Grande-Bretagne, présenté annuellement devant la Chambre des lords, publié dans la Gazette d’Amsterdam : voir Spicilège, nº 655, 667, 683, 696, 726, 726a, b, c, d ; voir aussi ibid., nº 547, 590.

1649

n3.

« Liste civile » : « Revenu propre du Roi, & qui lui est octroyé à son avènement à la Couronne pour toute la durée de son règne » (Mémoire sur l’administration des finances de l’Angleterre […] attribué à M. Grenville, Londres, 1768, t. 1, p. 52).

1649

n4.

Ce mécanisme par lequel les fonds affectés au remboursement de la dette de l’État (fonds d’amortissement) sont constitués par la réduction des intérêts est expliqué dans L’Esprit des lois et s’appuie sur l’exemple de l’Angleterre (XXII, 18).

1649

n5.

Diverses taxes sont affectées directement au paiement de ce revenu : accise, douanes, postes, permission de vendre du vin, rentes de terres qui restent à la Couronne, etc. (Mémoire sur l’administration des finances de l’Angleterre […] attribué à M. Grenville, Londres, 1768, t. 1, p. 52).

1649

n6.

Lire : entretien.

1649

n7.

Lire : shilling.

1650

n1.

Voir nº 1639, note 5.

1650

n2.

Voir nº 1649, note 5. La question du remboursement de la dette de l’État était d’actualité en France au moment de la transcription de cet article (secrétaire P, 1748-1750). Une première caisse d’amortissement fut fondée en 1749 par Machault d’Arnouville, alimentée par un nouvel impôt, le vingtième, établi le 19 mai par lit de justice (DAR, art. « Caisse d’amortissement »).

1650

n3.

Lire : conviendroit.

1650

n4.

Lire : devroit.

1650

n5.

Voir nº 1639, note 5.

1651

n1.

Montesquieu oppose ici l’origine essentiellement foncière de ses propres revenus à d’autres sources plus incertaines, comme les rentes détenues par les créanciers de l’État ou les investissements commerciaux. Lors du règlement de sa propre succession en 1755, le patrimoine de Montesquieu fut évalué à 654 563 livres ; voir François Cadilhon, Dictionnaire électronique Montesquieu, art. « Fortune, revenus, dépenses de Montesquieu » [en ligne à l’adresse suivante : http://dictionnaire-montesquieu.ens-lyon.fr/index.php?id=565].

1653

n1.

L’addition recopiée par le secrétaire correspond probalement à l’éventualité, envisagée par l’auteur, de remplacer « je renonceray a la mauvaise compagnie » par « je ne les verray plus ».