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CCCCLXXIX.

L’acquereur encore qu’il ait fait delais et obey à la clameur, peut dans trente ans demander l’heritage à luy vendu, si fraude a été commise en la clameur.

L’Article precedent a parlé de la fraude commise par le lignager en faveur de l’acquereurs et en celuy-cy il est parlé de la fraude et de l’intelligence pratiquée contre lacquereorBerault a remarqué un Arrest par lequel il a été jugé que ce n’est point une fraude que de revendre l’héritage rétiré cinq jours aprés le delais à celuy dont on avoit emprunté les demiers.

On a demandé ensuite fi c’est un moyen de fraude pour avoir vendu Phéritage avant même. que l’action en rétrait eût été formée : Josias Bertheaume Tabellion avoit pris par échange. une prairie du sieur Malherbe, et en contr’échange il avoit baillé quelques héritages avec trois petites parties de rente qu’il assûroit être foncieres, et lesquelles neanmoins n’étoient que des rentes constituées, et deox ans aprés il paya au sieur Malherbe quatre cens livres au lieu de ces rentes : vingt-emq ans aprés Pierre et Claude Malherbe fes enfans vendirent l’heritage que leur pere avoit baillé en échange à Bertheaune, et quelques jours aprés ils se rendirent demandeurs en retrait lignager, pour retiter cet héritage comme d’un Contrat frauduleox ; Pierre et Eustathe Bertheaume donnerent les mains à cette demande, mais depuis ayant découvert que les sieurs Malherbe avoient difposé de cet héritage, avant le delais ils se pourvûrent de Lettres d’appel et de restitution, dont ils forent deboutez par le Vicomte et par le Bailly d’Alençon au nege de Trun, dont ayant appelle Bertheaume leur Avocat employoit cet Article pour moyens d’Appel. Je défendis pour les fieurs Malherbe, et dis que comme la Coûtume avoit donné trente Sans aux fignagers pour découvrir la frapde commise à leur prejudice, elle avoit accordé le même tamps à l’acquereur pour s’instruire si L retrait avoit été demandé en fraude : mais cet Article étoit en la faveur d’un acquereur de bonne foy, qui avoit contracté sans déguisement et sans fraude, et non pour celuy qui avoit taché de le forprendre. Pour juger si le Contrat est rrauduleux, il faut connoître ce que c’est que frande et en quoy elle consiste. Le rétrait est rauduleux lors que le lignager prête son nom à l’effet de remettre Phéritage à un autre sans en profiter ; ce n’est donc point une fraude quand aprés le retrait on revend avec un profit considérable, car ce retrait lignager est reçû en Normandie à deux fins. 1. Pour conserver les terres dans la famille, et pour donner moyen aux parens de gagner quelque chose quand l’heritage est donné à trop bon marché, d’où il s’enfuit que ce n’est pas une fraude pour avoi fimplement vendo avant le retrait : La Cout ayant décidé qu’il p’y en avoit point pour avoir revendu cinq jours aprés le delais à celuy même qui avoit prété les deniers, il y en a beaucoup moins quand on vend avant le retrait, fors que l’on ne rapporte point d’autres moyens de fraude : Le profit que les Intimez avoient fait par cette revente justifioit que leur pere avoit té trompé plus que moitié de juste prix ontre la facolté de temere qu’ils avoient retenuë, et aprés tout la voye de rerrait ne leur étoit pas necefsaire paroissant que l’on avoit aillé des rentes constituées pour des rentes foncieres, ce qui pouvoit donner lieu à la resoution du Contrar : Par Arrest en la Grand. Chambre du 24. de May 1672. la Sentence fut confirmée

C’est une Maxime certaine en matière de rettait, que le lignager retrayant est obligé de juter et de se purger par serment sur le fait de fraode et d’accommocation de nom pretenduë par acquereur de l’hertrage fujet à retrait ; Trran. gl. 1. n. 1. et 6. Cum & Patronus teneatur jurare ;Molin . de feud. 5. 13. rl. 1. n. 31. ce qui est aussi decidé par quelques Coûtumes, et par-reulierement par celle de Poitou, Att. 324. Valois, Art. 143. et Breragne, Art. 310. Mais on a demandé si ce ferment pouvoit être fait par procuration la partie étant absente, ou si l’on est obligé de prêter le serment en petsome ;

La raison de douter est que par lOrdonnance de Loüis XII. il est dit qu’au cas que les garties ne seroient au lieu où fe traire le procez il suffira d’envoyer procuration pour répondre par serment, et que par la difposition de Dron en la l. In peruniatis, c. de procur. il est permis in pecuniariis controversiis, de répondre par Procureur. On allégue au contraire, que par la l. Generaliter, S. de rebus prasentib. C. de reb. cred. en des moaes, necesse est vel ipsam principalem personam datis certis indiciis ad judicem venire, ut ea quae de sacramentis statuta sunt suppleat, à quose rapporte l’Ordonnance de François I. de l’an 1539. Art. 36. 37. et 38. et celle de Charles I et. de l’année 1563. Art. 6. et c’est aussi le sentiment deFaber , in suo Cod. l. 4. t. 1. defin. 31. et de Guenois sur les Instit. foren. d’Imbert , l. 1. c. 38. ce qui peut être foûtenu par cette aison, que lon pense mieux à soy lors que lon jute en persone que l’on ne feroit pas si l’on étoit reçû à faire une simple affirmation par procuration, et c’est peut-être par cette raison qu’en la l. 7. ff. de in lit. jur. Papinien resout alium non posse jurare quam eum qui lirem contetatus est ; et un autre Jurisconsulte en la l. 4. du même titre rend cette autre raison grave videtur ignorantes sub alieni emolumenti compendio etiam perjurium anceps subire. Suivant cela se donna Arrest en l’Audience de la Grand. Chambre du Parlement de Paris du 30. de Max 1650. par lequel il fut jugé contre un retrayant étant lors en Auvergne à la suite d’un grand seigneur, contre lequel l’acquereur avoit soûtenu qu’il y avoit fraude, et que ce n’étoit point ET. CLAMEUR

pour luy qu’il vouloit retirer l’héritage, et qu’il s’en rapportoit à son serment, il avoit envoyé sa procuration contenant son affirmation, sans avoir égard à laquelle le premier Juge en luy ajugeant le retrait avoit ordonné qu’il feroit son affirmation en personne dans la quinzaine : Sur son appel il representoit l’impossibilité dans laquelle il étoit de quitter son maître et de venit en Champagne faire cette affirmation, laquelle n’étant point désirée par la Coûtume du lieu pouvoit être faite par procuration, qu’en tout cas il offroit de la faire en personne au païs où il étoit ; nonobstant ses défenses la Sentence fut confirmée.