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CCC.

Comment l’aîné succede au puisné.

Si aucun des puisnez décede sans enfans, l’aîné aura les deux tiers aux biens de la succession paternelle, et les puisnez l’autre tiers.

Il y a beaucoup d’apparence qu’autrefois dans toute la Normandie l’ainé avoit la succession entiere du puisné qui mouroit sans enfans ; carLithleton , l. 1. 8. 5. rapporte nôtre ancienne Coûtume en cette manière. Item si soient trois freres, et le minin frere pourchasse terre en fersimple et deuy sans issué, leigné frere avera la terre qui décend, et nemi le puisné pur ceo que leigné est plus digne de sang.

Quelques-uns ont estimé que pour donner lieu à la disposition de cet Article, il faloit qu’il restât un des freres puisnez en vie, pour empescher l’ainé de prendre la succession entière du frere puisné qui seroit mort sans enfans, et pour cet effet on se sert des dernieres paroles de cet Article, qui portent que l’ainé a les deux tiers et les puisnez l’autre tiers ; d’où l’on argumentoit que cet Article étoit au benefice seul des puisnez et non point de leurs enfans. Cela Et naître un procez entre les nommez le Poulletier. Me le Poulletier, Curé d’Estouteville, étant mort, sa succession fut prétenduë par les enfans d’un frere puisné d’une part, et par son frère ainé, qui soûtenoit que cet Article n’avoit lieu que quand il restoit des freres n puisnez vivans, et ayant obtenu Sentence aux Requêtes du Palais, sur lappel des enfans du frere puisné la cause fut appointée au Conseil : Les mieux versez dans la Coûtume de Caux ne doutent pas que quand il reste un frere vivant, l’ainé ne peut avoir que les deux tiers dans la succession du puisné, parce qu’en ce cas il s’agit véritablement de partager la succession d’un frère. f La Coûtume ne parlant que des puisnez, on a douté si la dot d’une seur décedée sans enfans devoit être partagée comme celle d’un puisné, pour y donner les deux tiers à l’ainé, et aux puisnez l’autre tiers : La raison de doutor êtoit que suivant l’Article 297. la sour avoit été mariée n de meubles, qui se partagent également entre les frères, mais cette question se décide par cette raison, que cette dot est un immeuble remplacé sur les imieubles du mary ; que si ses biens sont situez en Caux, c’est une rente qui se partage selon la loy du domicile du maty debiteur l comme les autres rentes ; que si ses biens sont en bourgage ou dans la Coûtume generale, la rente est divisible également entre les freres : ainsi jugé en la Grand. Chambre, au Rapport de Mr de Toufreville-le-Roux, entre les sieurs du Bourguer, le 30 de Juin 1655.

On pouvoit dire qu’il faloit distinguer lorsque le mariage avoit été pris sur les immeubles, et qu’en ce cas la rente dotale se partageoit selon la nattre des biens du mary ; mais quand il avoit été payé des meubles de la succession, comme les freres y avoient contribué également, cette dot leur devoit retourner à proportion, ne leur retournant pas à droit successif, mais par un droit de reversion : mais la succession d’une feur n’est pas d’autre nature que celle des freres, et puisqu’en celle-cy l’ainé n’a que les deux tiers, il ne peut demander plus grande parti en celle de la soeur. Pour les acquests l’ainé n’y a point davantage, ils se divisent également entre les freres, et par Arrest du 12 de May 1659. entre de Beaucousin et autres, il fut jugé que les acquests de l’oncle situez en Caux se partagent par teste entre les neveux, fils des freres puisnez, et les filles de l’ainé.

Cette distinction seroit bonne si la soeur n’avoit point êté mariée, en ce cas les freres ne luy devant qu’une provision, et la proprieté ne luy appartenant point, par sa mort il se feroit une extinction de cette provision, et par ce moyen chaque frère demeureroit déchargé de la portion ù laquelle l’ainé contribuoit : Ce qui fut jugé de la sorte par l’Arrest du sieur de Bailleul, rapporté sur l’Article 268. et les parties en cet Arrest étoient domiciliées en Caux ; mais quand la seur par son mariage a acquis la proprieté de sa dot, comme elle pouvoir, ou son mary, la remplacer en tel lieu qu’il leur auroit semblé bon, cette dot doit être partagée selon la Coûtume des lieux où elle est dûë-

Autre Arrest, au Rapport de Mr de Vigneral, du 14 d’Aoust 1656. par lequel il fut jugé qu’un pere nyant constitué une rente sur ses biens, qui étoient tous situez en Caux, pour la dor de sa fille, le frere ainé succedoit aux deux tiers de la rente dotale de cette fille morte sans enfans. Il fut aussi jugé par le même Arrest que la part qui revenoit de cette rente à un puisné aprss la mort de ce puisné sans enfans, retournoit à l’ainé comme d’une ancienne succession collaterale Cette question s’offrit entre Mr Bouchard, Conseiller en la Cour, et le sieur de Côtecôte son neveu, fils de son frere, pour la reversion de la dot de la Demoiselle de Chefderuë que edit sieur de Côtecôte, fils du frère ainé, prétendoit avoir entièrement, comme ayant été consignée sur les biens du sieur de Chefderuë tenans nature de Caux : Il se fondoit sur ces deux maximes ; la premiere, que les rentes constituées se partagent selon la nature des biens des obligez ; et la seçonde, que par l’Article 303. le frère ainè a l’ancienne succession de ses parens collateraux, sans en faire part à ses puisnex. Le sieur Bouchard répondoit qu’ayant payé la moitié du mariage de la soeur, il faloit en partager également la reversion, qu’il n’étoit pas raisonnable qu’il en eût payé la moitié pour en faire une constintion sur le mary au profit de son frere. La Coûtume de Caux attribué entièrement à lainé lancienne succession des collateraux, mais la reversion de dot ne peut être appelée ancienne succession aparce qu’en Nor-mandie les filles ne sont point heritieres lorsqu’il y a des mâles, et n’ont rien d’ancienne succession ; ce que leur pere ou leurs freres leur donnent pour leur dot, qu’elles prennent ordi-nairement sur leurs meubles, ne peut être reputé ancienne succestion, ces mots peuvent être entendus des héritages et immeubles qui sont faits propres en la famille, et qui s’y sont conser-vez long-temps. Par la disposition du droit la dot retourne à celuy qui l’a donnée ; dos à parre profecta, si in matrimonio decesserit mulier filia-familias, ad patrem rédire debet. l. dos à patre. C soluto matrimonio. Dos quemadm. pet. il n’étoit point question de partager une rente, le mars n’étoit debiteur aux frères de sa femme que d’un denier qu’il avoit reçû d’eux également, et Je rendant aprés la dissolution du mariage, il doit être partagé également. jur cette question d’entre les sieurs Bouchard, par Sentence des Requêtes du 1é d’Aoust 1619. il fut ordonné que les parties auroient delivrance chacune par moitié des deniers consignez, et au principal reglez à écrite ; mais j’ay appris que par Arrest les deux tiers furent ajugez à l’ainé, ce qui a été aussi jugé par l’Arrest des sieurs du Bourguet dont je viens de parler.

On a fait cette question, si le pere ayant disposé du tiers en Caux en faveur des puisnez, et les ayant substituez les uns aux autres, aprés la mort du pere et les partages faits entre les puisnez, l’un d’eux mourant sans enfans la succession sera divisée également entre les puisnez ou si l’ainé des puisnez y aura les deux tiers ; La raison des puisnez est que cette succession leur est déférée par la disposition du pere et non par celle de la loy ; or cette substitution appelloit tous les puisnez sans distinguer pour quelle part elle leur appartient, jure accrescendi non jure hereditario : On dit au contraire que cette disposition du pere pour le tiers n’a d’autre but que d’en exclure l’ainé, pour faire succeder reciproquement les puisnez les uns aux autres, que cela neanmoins n’empesche pas que la Coûtume ne soit suivie ; on peut même douter si le pere l’aurois pû, mais qu’en tout cas ne l’ayant point fait il faut en demeurer dans le droit commun. Le pere étant le maître absolu de ce tiers, et pouvant le donner à l’un au préjudice des autres, ou le laisser s’également à tous, lorsqu’il en a fait une donation à tous les puisnez, et qu’il les a substituez les l uns aux autres, puisqu’il les a rendus égaux en l’institution, ils le doivent être dans la substitution, et la presomption que son intention a été telle est favorable, parce qu’elle conserve et continuë. à l’égalité qu’il avoit luy : même établie d’abord entre ses enfans :