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CCLXXV.

Succession de batard. Bâtard ne peut succeder à pere, mere, ou aucun, s’il n’est legitimé par Lettres du Prince, appelez ceux qui pour ce seront à appeler.

Ménage , en ses Origines de la langue Françoise, sur le mot cbâtard, ) dit qu’il vient du mot Allemand boétard, qui signifie la même chose, et qu’il est composé de Boes et d’Ard, qui veut dire la mauvaise naissance ; Mr Cujas en rapporte à peu prés la même étymologie sur la seconde partie de la Novelle 18.

Les Hebreux avoient de trois sortes d’enfans ; les premiers, qui étoient issus de mariages. legitimes ; les seconds, ceux qui étoient nez de concubines ; et les troisiémes, ceux qu’ils avoient engendrez de leurs servantes ou esclaves : Les enfans du premier et du second genre succedoient à leurs peres, car il n’y avoit que cette différence entre les femmes et les concubines, que les premieres étoient épousées solennellement et avec des conventions matrimoniales, mais on prenoit les concubines sans aucunes cérémonies et sans aucunes pactions dorales, pour Selden les enfans du troisième genre ils étoient incapables de succeder, Seldenus de Success. ad leg. Hebr Cela est conforme à ce passage de la Genese, non erit heres filius ancillae. quelques-uns neanmoins ont estimé que les enfans des servantes étoient admis à la succession, et pour la preuve on rapporte lexemple de ce partage fait entre les enfans de Jacob, où les enfans des servantes eurent une part égale avec les enfans de ses femmes legitimes ; mais on ne manque pas d’exemples contraires, car Abraham ne priva de sa succession que les enfans qu’il avoit eus de les servantes, et les enfans de Galaad chasserent Jepthés, parce qu’il étoit issu d’une femme dultere : Pour concilier ces autoritez qui semblent contraires, il faut remarquer que les enfans de Jacob, sortis de ses servantes, ne furent pas considèrez comme des bâtards, parce que les femmes mêmes de Jacob, qui désiroient ardemment d’avoir des enfans, les presenterent a leurs maris, et adopterent en suite pour leurs enfans ceux qu’elles avoient engendrez, de sorte qu’elles les considérerent comme leurs propres enfans

La différence que le droit civil avoit mise entre les enfans naturels et les bâtards inter naturales et spurios, est aujourd’huy tout à fait inutile, et c’est pourquoy il est fort mal-aisé d’appliquer les dispositions du droit Romain à nôtre Usage et à nôtre Coûtume. Ils appeloient sensans naturels ) Constantin reux qui étoient procréez d’une concubine : les Loix depuis Constantin avoient pris quelque soin de leur sûvenir, parce qu’ils étoient nez d’une conjonction que matrimonium imitabatur, et laquelle êtoit permise anciennement : c’est pour cette raison qu’ils étoient capables de la liberalité de leurs peres et ayeuls, Authen. licet C. de nat. lib. mais pour ceux qui naissoient d’une conjonction illicite ex vagae & incertae veneris feti, qu’ils appeloient Spurios et vulgo conceptos, ils n’étoient point considèrez par le droit civil, qui les privoit même des alimens comme enfans de tenebres, MOTGREC & MOTGREC, Nov. 89. cap. ult.

La pureté du Christianisme n’ayant pû souffrir le concubinage, et toutes conjonctions, hors celle du mariage legitime, étant reprouvées, tous les enfans nez hors cette conjonction font de pareille, condition, et aujourd’huy le concubinage non legitimae conjunctioni, sed scortationi deputatur :Cujac .

Obser. l. 5. c. 6. L’EmpereurLeon , en la Nov. 91. parlant de cette loy qui permettoit le concubinage, lex illa in aternum siletoi et Benedicti C. Rainutius in verbocvirum et uxoremyDecis. 5. n. 147. in prasenti regno Franciae ex illius Catholico more Bastardi nonsuccedunt, nec aliud prater alimenta petere possunt, C’est aujourd’huy un usage presque general dans l’Europe que les bâtards ne succedent point Les Anglois et les Ecossois en suite ont reçû cette Coûtume des Normans ;Glanville , 1. 7. c. 13.

Skenaeus de leg. Scot. l. 2. c. 50. Et quoy que par le droit Romain les enfans naturels succedassent à leurs meres ab intestat, néanmoins dans quelques Provinces où le droit Romain a lieu cela ne subsiste point, comme à Tolose : GuyPapé , en sa Question 180. etBonneton , en son Commentaire, disent qu’on garde encore le droit Romain dans le Dauphiné OII sembloit juste aprés avoir déclaré les bâtards incapables de succeder, d’ordonner quelque chose Justinien Constantin touchant leurs alimens ; Justinien, en sa Novelle 89. dit qu’avant Constantin on ne trouvoit aucune loy en faveur des enfans naturels, les Romains ne paroissant pas avoir eu beaucoup de soin et de tendresse pour les enfans de cette qualité. MOTGREC MOTGREC MOTGREC MOTGREC MOTGREC MOTGREC MOTGREC, MOTGREC MOTGREC MOTGREC, MOTGREC MOTGREC MOTGREC MOTGREC MOTGREC, MOTGREC’MOTGREC MOTGREC MOTGREC MOTGREC MOTGREC MOTGREC MOTGREC MOTGREC MOTGREC, MOTGREC MOTGREC MOTGREC MOTGREC MOTGREC MOTGREC MOTGREC MOTGREC MOTGREC, MOTGREC MOTGREC MOTGREC MOTGREC MOTGREC MOTGREC. : Les peres neanmoins ne laissoient pas de leur donner et même de les instituer Constantin heritiers, mais ils le faisoient volontairement, non legis ullius sollicitudine. Constantin fit une loy fort humaine, et nothorum genti perquam utilem : Elle ne se trouve plus à present, et il ent est fait mention dans la l. Dius Constantini. C. de nat. lib.Herald . quotidian. quest. l. 1. c.

Bien que nôtre Coûtume n’ait rien dit pour les alimens des bâtards, par un temperament équitable on oblige les peres ou leurs meres à leur donner quelque chose par forme de pension alimentaire : Il les doivent élever jusqu’à ce qu’ils leur ayent donné le moyen de gagner leur vie, imitans en cela les autres animaux qui n’abandonnent leurs petits que quand ils peuvent chercher leur pature ; et c’est pourquoy pour se décharger de cette nourriture, non seulement Ils sont tenus de leur faire apprendre mêtier, mais aussi de les en faire passer maîtres, et s’ils ne lont fait de leur vivant, leurs heritiers aprés leur mort doivent fournir tout ce qui est Loüet necessaire pour cet effet, parce que sans la maitrise ils ne pourroient gagner leur vie : Loüer, l. a. fl. 4. Par Arrest du 25 d’Octobre 1661. on confirma la Sentence du Bureau, qui condamnoit le sieur de Gueudeville en cent-cinquante livres de pension envers Jean Caron son fils naturel, et en cent livres pour les frais. Autre. Arrest du 12 de Juillet 1662. le sieur de Freval fut condamné à payer une pension viagere à Jean Bufard, fils naturel de Charles de Frevali à prendre sur sa succession : Et même par un autre Arrest du 4 de Mars 1660. on condamna Pierte Tharel à payer les arrerages de cinquante livres de rente qu’il avoit donnez pour titre à Me Jean Tharel son fils, pour la nourriture de lenfant naturel de ce Prestre.

Il resulte des Arrests précedens que les alimens sont dûs aux bâtards, non seulement par leurs peres, mais aussi par leurs heritiers.

Il y a eu de la difficulté sur ce point, sçavoir si la pension et la nourriture du batard doit être payée par l’heritier aux meubles ou par lheritier aux immeubles, et si la veuve de celuy qui avoit un bâtard et laquelle est depuis devenue heritière de l’enfant issu de leur mariagé, et qui par ce moyen a eu tous les meubles et son doüaire, est tenue de contribuer à la nourriture et à la pension du bataid de son mary

La veuve alléguoit pour défenses que toute pension à vie est une espèce d’usufruit et de charge réelle qui doit être acquitée sur le revenu des immeubles : les meubles ne doivent que les charges mobiliaires, et les immeubles les réelles et annuelles.

Tout ce que la veuve prend aux meubles et immeubles de son mary, c’est jure matrimonii jure societatis, et à lege : mais cette loy ne charge point la veuve de noutrir les bâtards de fon mary, elle ne peut pas même être obligée à la nourriture des enfans legitimes.

Il n’y a rien de plus odieux et de plus intolerable à une femme chaste que l’incontinence de son mary : les enfans qui naissent, de cet infame commerce avec des femmes impudiques sont un perpétuel objet de haine et d’indignation à la femme, cum ad contemptum sui domus-ve suae cum impudicis mulièribus coetum inierit maritus, quod maximè castas exasperat. l. Consensu. C. de repud. Il est si juste que ces honteuses productions soient chassées de la maifon du mary, qu’Abraham ne pût refuser cette fatisfaction à Sara, quand elle luy dit éjice ancillam hanc & filium ejus. Abraham même fut obligé de la chasser par le commandement de Dieu, sans donner poutefois de pension à son bâtard, mais seulement du pain et de leau ; le pere ne luy a rien donné, quoy qu’il pût le faire. Il ne reste donc aucune action que pour les alimens qu’on uy donne, humemitatis intuitu, mais ils doivent être pris sur les revenus des immeubles : Par Arrest de hir de Février 1621. entre Cavelier sieur de Villequier, tuteur des enfans du sieur de Breteville, Jean heritier du feu sieur de Huménil leur oncle, et Demoiselle Geneviéve le Sueur, veuve dudit sieur de Huménil, et héritière aux meubles de l’enfant sorti d’elle et dudit sieur de Huménil, ladite Demoiselle fut déchargée de la nourriture et pension du batard de son mary, qui étoit né durant leur mariage, et même déchargée de la contriontion, et les heritiers aux immeubles condamnez au payement de la pension.

Si le batard êtoit né avant le mariage, en ce cas la veuve n’est pas dispensée de contribuer à la nourriture du batard de son mary. Charles Minfant, fils naturel de Minfant, sieur d’Ancourt, poursuivit les heritiers de son pere pour luy payer une pension alimentaire : les heri-tiers appelerent en la cause la veuve afin d’y contribuer étant legataire et héritière de son mary : Ils opposoient au batard que son pere luy avoit fait apprendre un mêtier, que les alimens n’étant dûs à lege, sed ex naturali aaequitate, non debebantur, et qui aliunde habet undi alatur, qu’étant en âge de gagner sa vie et sçachant un mêtier, on n’étoit plus obligé de luy ayer une pension alimentaire. Le bâtard répondoit que le sieur Dancourt avoit laissé une uccession de vingt mille livres de rente, que des heritiers collateraux étoient mal favorables à disputer une pension à son fils naturel, qui non suo vitio laborabat, sed paterno ; Il étoit vray qu’on luy avoit fait apprendre un mêtier de Passementier, mais qu’on ne luy en avoit pas acquis la maîtrise, ce qui lempeschoit de tenir boutique : La veuve défendoit de son chef, disant qu’il n’y avoit pas de pretexte à l’obliger de nourrir le bâtard de son mary, parce que quand même il agiroit du mariage de sa fille legitime, elle ne pourroit être forcée à y contribuer de son oien, quia paternum est officium dotare filias : Par Arrest du 23 de Janvier 1641. en la Chambre de l’Edit, on ajugea cinq cens livres de pension au bâtard, au payement de laquelle la veuve contribuëroit pour la part qu’elle prenoit en la succession de son mary : voyezLoüet , 1. D. n. 1.

Cette charge de nouirir un bâtard ne doit s’étendre que sur le pere ou ses heritiers, et non pas sur la parenté : Par Arrest du 19 de May 1611. entre les enfans de Romain le Seigneur neritiers de Vincent le Seigneur, et les enfans de défunt Jacques, bâtard dudit Vincent le eigneur, les parens du pere furent déchargez, sauf aux enfans du batard à faire appeler leurs irens au Bureau pour leur donner des alimens. Autre Arrest du 29 de Janvier 1658. en Audience de la Chambre de la Tournelle, une servante nommée Jeanne à l’Epée avoit demeuré trois mois chez une veuve de la ville d’Evreux ; cette servante étant accouchée six mois aprés être sortie hors de la maison de cette veuve, elle donna son enfant à son fils : Il desavoüa que cet enfant fût de ses oeuvres, offrant prouver que cette. Jeanne à Epée étoit une publique qui s’étoit abandonnée à toutes sortes de personnes pendant qu’elle demeuroit dans fa maison, ce qui fut ainsi rapporté par l’information qui en fut faite ; en consequence dequoy le fils fut renvoyé de cette action, comme aussi le Receveur du Bureau qui avoit été appelé en la cause ; mais le nommé à l’Epée et les autres paren de ladite Jeanne furent condamnez à la nourriture de ce bâtard, dont avant appelé, le Bourgeois leur Avocat soûtenoit que des parens collateraux n’étoient point obligez à la houtriture dlu batard de leur parente, parce qu’il n’étoit point leur parent, que les batards nec genus, nec familiam habent, que les Arrests l’avoient ainsi jugé. Bérault rapporte celuy d’Herambourg sur l’Article 426. et 604. Le François plaidoit pour le fils, et remontroit que la mauvaise nie de ceute impudique étant prouvée par l’information on ne pouvoit luy donner cet enfant, quoy qu’elle fût devenue grosse pendant le temps qu’elle demeuroit chez sa mere ; et le Page ae jeune plaidant pour le Receveur du Bureau d’Evreux, concluoit que le maître en la maison luquel la servante étoit devenuë grosse êtoit présumé le pere de l’enfant, en tout cas que les patens de la mete étoient obligez à la nourriture, et qu’encore qu’il fût bâtard la nature le faisant leur parent, ils ne pouvoient l’abandonner. Les Arrests n’étoient pas dans cette espèce, et l’on avoit seulement déchargé les parens du pere, parce qu’ils n’étoient pas tenus à veiller uur sa conduite, mais non les parens de la mere, lesquels étant obligez de prendre garde sut les actions et sur la conduite d’une jeune fille leur parente, sont garands des fautes qu’elle commet, par argument des Articles 101. et 102. de la Coûtume, suivant lesquels les parens sont tenus de prendre garde à ceux qui sont troublez. Mr l’Avocat General le Guerchois ayant fait lecture de l’information, et suivant ses Conclusions, la Cour mit l’appel et ce dont, en ceformant, condamna le Receveur du Bureau à se charger de l’enfant.

En l’anée 1600. du Moutièr eut une batarde de la nommée Bertout sa cousine germaine, le mariage qu’il avoit contracté avec elle fut declaré nul par un Arrest de ce Parlement de l’année 16o8. et par un Arrest du Privé Conseil il fut dit que cet Arrest seroit executé, et neanmoins on jjugea à cette batarde nommée Marie du Moutier quelque fomme à prendre sur les biens du pere, et on la déclara capable de succeder aux biens de sa mere : Les petits enfans de cette batarde, nommez Marc, ayant prétendu la succession du sieur Bertout, elle leur fut. contestée par des nommez Bertout, qui les soûtenoient incapables de succeder aux parens, tant dela ligne paternelle que maternelle, et que l’Arrest du Conseil devoit être restreint à la seule succession de la mere, ne pouvant avoir lieu pour les successions des parens maternels. Ces petits enfans répondoient que Marie du Moutier ayant été déclarée capable de fucceder à sa mere, cette capacité s’étendoit à toute la ligne maternelle, des Bertout, parce qu’étant sa mere elle : luy avoit trans-mis tous ses droits, quia hereditas nihil aliud est quam successio in jus defuncti : Or comme ladite Sertout avoit la capacité de succeder à ses parens, de même ladite du Moutier, qui étoit son deritière, avoit le même droit que sa mere, autrement si elle avoit eu moins de droit, elle n’auroit pas été véritablement son heritiere : En second lieu, que les nommez Bertout, parens maternels, auroient succedé aux biens qui luy étoient échûs du côté de sa mere, et puisque les parens maternels auroient été capables de succeder aux biens maternels de ladite du Moutier, par la même raison elle avoit été aussi capable de leur succeders en effet les parens l’avoient reconnu de la sorte par plusieurs actes durant cinquanteans : Par Arrest du 19 de Février 1665. la succession ut ajugée ausdits Marc, plaidans Freville et Durand. Autre Arrest sur ce fait : Leonard Perdrix aprés la mort de sa femme, arrivée le 15de Decembre 1648. épousa Bunache fa servante le ro de Janvier 1649. elle accoucha le 27 de May, de sorte qu’à compter du jour de son mariage. fet enfant êtoit né quatre mois dix : sept jours aprés, et à compter du jour de la mort de la premiere femme, il étoit né à cinq mois douze jours : Aprés la mort de Perdrix cette femme fit ppeler au Bureau de Roüen les parens de son mary pour nourrir cet enfant, à quoy ayant. été condamnez, sur l’appel ils prouvoient par le temps du mariage et de la naissance que cet enfant êtoit adulterin, et qu’il n’étoit pas juste de charger des parens de la nourriture du bâtard de leur parent : La mere répondoit que la question de l’état de l’enfant devoit être differée jusqu’à sa majorité, cependant que suivant l’Edit Carbon. il faloit luy fournir des alimens ; on repliquoit que cet Edit n’avoit lieu que causâ cognitâ, et si manifesta calumnia apparuerit, non dabatur bonorum possessio : Par Arrest en la Grand. Chambre du 7 de Février 1651. on cassa la Sentence comme lonnée incompetemment, et on déchargea les parens, sauf à la mere à se pourvoir sur les biens du pere. On préjugea que l’enfant n’étoit pas legitime, étant né à quatre mois dix-sept jours, ou au plus à cinq mois douze jours, et ainsi l’on jugea que les parens n’étoient point tenus à la nourriture de ce bâtard. En traitant des alimens qui sont donnez aux bâtards, il ne sera pas hors de propos de parler de la noutriture des enfans exposez. Par la jurisprudence des Arrests du Parlement de Paris, les Hauts-Justiciers dans tétenduë de la Haute-Justice, desquels un enfant est exposé, sont tenus de luy pourvoir de nourriture et d’entretenement, Journal des Audiences, seconde partie, l. 1. c. 13. Nous en usons autrement en cette Province dans letenduë de la banlieuë de la ville de Roüen, l’Hopital a été condamné de se charger de la nourriture des enfans xposez. Dans les autres lieux de la Province cette nourriture tombe en charge au Tresor de la Paroisse. Selon la disposition de quelques Conciles de France les enfans exposez étoient nourris par les Ecclesiastiques, des aumones faites à l’Eglise pour la nourriture des pauvres, et depuis les Hopitaux ayant été bâtis, ils ont été tenus de nourrir les enfans exposez ; et dans les lieux où il n’y en a point, comme le Tresor de l’Eglise est composé d’aumones, cette nourriture doit être à sa charge : Les Arrests du Parlement de Paris, qui ont condamné les Hauts-Justiciers à pourvoir à leur nourriture se sont fondez sur cette raison, qu’il faloit considerer ces enfans-li comme une espèce d’espaves ; ; ainsi comme les espaves appartiennent aux Hauts : Justiciers, et même les successions des bâtards décedez sans enfans, ils en devoient souffrir les incommoditez et en demeurer chargez

Bien qu’il soit vray que les bâtards neque gentem, neque agnationem habeant, et que la bâtardise ôte tous les droits successifs, elle n’éteint pas neanmoins les droits du sang, et l’on présume que ce defaut de la naissance n’efface pas absolument les sentimens d’amitié et de protection, de la part des parens du pere du bâtard, et c’est pourquoy quand on a proposé des recusations contr’eux, pour les faire abstenir de connoître des procez où le batard avoit interest, on a trouvé qu’ils étoient recusables : Par Arrest en la Chambre de la Tournelle du 9 d’Avril 1631. il fut jugé que Messieurs Magnard President, du. Val : Coupeauville, et de la Champagne ; Conseillers, s’abstiendroient de connoître du procez du fils bâtard du sieur du Val-Poutrel, dont ils étoient parens en degré éloigné ; Et par un autre Arrest en la Chambre de IEdit de l’année 1629.

Messieurs Bretel President, Côté et Pigné, Conseillers, furent jugez recusables de connoire du procez du batard de Mr de Viquemare ; ces droits du sang subsistent si véritablement, qu’ils empeschent le mariage entre les parens du bâtard et les décendans du bâtard. On a agité cette question, si l’on devoit mettre au rang des bâtards et des enfans incestueux ceux qui étoient issus du mariage d’une grande tante avec son petit-neveu d’alliance, et si la Dispense accordée par le Pape êtoit valable : Auxout épousa en secondes nopces Marguerite Boulier, il avoit un arriere, neveu sorti du fils de sa seur nommé Belay : aprés la mort l’Auzout Boulier sa veuve se prostitua avec Belay, dont elle eut des enfans ; ils obrinrent Dispense pour se marier, et l’Official de Coûtance aprés avoir entendu quelques témoins leur permit de se marier : Aprés la moit de Belay sa succession fut disputée à ses enfans, comme étant issus d’une conjonction incestueuse ; ils obtinrent Sentence à leur benefice : Sur l’appel de enfans de la sour de Belay, qui étoient aussi appelans comme d’abus de l’execution de la Diipense, Dudit, leur Avocat, soûtint que la Dispense n’avoit pû être accordée du premier dégré d’alliance au tiers degré, que comme les ascendans et décendans ne peuvent. contracter mariage, les oncles et les tantes tenans lieu d’ascendans le mariage en êtoit prohibé. De Préfontaine et Greard, pour la Boulier et ses enfans, remontroient qu’il ne s’agissoit que d’alliance, dont l’empes chement êtoit moindre que celuy des cousins germains que si le Pape pouvoit dispenseru second degré, il avoit pouvoir de dispenser au troisième degré : Par Arrest du s de Février 1653. on confirma les Sentences

Un bâtard légitimé par Lettres du Prince, à la requisition de son pere naturel, fut declaré tapable de recueillir le legs universel qui luy avoit été fait par le testament de sondit pere, de tous ses meubles et acquests, en quoy consistoit tout son bien, au préjudice des heritiers colà lateraux, qui soûtenoient que par la Coûtume generale de France les bâtards ne peuvent suc-ceder à leurs pere et mere, et par consequent ne peuvent être logataires universels, puisque le legataire universel est loco heredis.