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CCLXII.

Estimation du mariage avenant.

Mariage avenant doit être estimé par les parens, eu égard aux biens et charges des successions des pere et mere, ayeul ou ayeule, ou autres ascendans en ligne directe tant seulement, et non des successions échûës d’ailleurs aux freres, et doivent ceux qui feront ladite estimation faire en sorte que la maison demeure en son entier, tant qu’il sera possible.

Nous n’avons rien dans nos Usages et dans nos Coûtumes dont la reformation fût plus utile et plus necessaire que ce qui concerne la legitime ou le mariage avenant des filles : la manière de le regler et d’en faire l’arbitration est si difficile et si embarrassante, que les plus experimentez ont de la peine à la bien comprendre.

Premierement, les termes dont la Coûtume se sert ont besoin d’explication : on ne sçait si ce mot savenant j’a sa relation à la personne et à la condition de la fille, où aux biens de la successions si ce mariage avenant doit être une portion convenable et proportionnée à la condition de la fille, ou aux biens hereditaires, ou si l’on doit avoir ces deux égards en procedant à cette arbitration, et en cette manière on rend les parens en quelque façon les maîtres de cette liquidation ; car la Coûtume n’assignant point aux filles une part certaine, ce mariage avenant, ou cette portion convenable, dépend nécessairement de l’opinion et de l’affection des parens, qui soûtiendront que la portion qu’ils auront reglée est avenante à la fille, et par consequent qu’ils ont suivi l’intention de la Coûtume. Nôtre Coûtume neanmoins n’est pas la seule qui se soit expliquée de la sorte : Par les Coûtumes du Royaume de Sicile, dont apparemment nos Heros de Normandie. nt été les Auteurs, les fillesme succedent point quand il y a des mâles, mais les fils succedent seuls, tant aux fiefs qu’aux biens de bourgage, et ils ne doivent à leurs seurs qu’un mariage tenentur sorores fecundùm paragium maritare ; mais s’il n’y a point d’enfans mâles, les filles succedent en tous les biens de leurs peres et mères, tant nobles que roturiers, tam in feudalibus quam burgensaticis,Matth. de Afflict . Constitut. Neapol. l. 3. Rubr. 23.

La Coûtume en cet Article ordonne que le mariage avenant soit estimé par les parens ; mais elle n’apprend point jusqu’à quelle portion ce mariage avenant doit s’étendre, ni en quoy il doit consister ; elle a disposé dans les Articles precedens qu’elles ne succedent point tant qu’il y a des mâles ; elle prescrit aux parens de regler ce mariage avenant selon les biens et les charges des successions des pere et mere, ayeul ou ayeule, ou autres ascendans en ligne directe seulement, et non des successions échûës d’ailleurs aux fretes : les parens sont encore exhortez, en procedant à cette estination, de faire en forte que la maison demeure en son entier, mais elle ne passe point plus avant ; on oublie d’instruire les parens que leur arbitration ne doit point exceder. telle ou telle portion de la succession.

Il est vray que suivant les Articles 254. et 255. les freres peuvent faire réduire les dons et promesses des peres au tiers de la valeur de leurs successions, et par l’Article 269. les soeurs, quelque nombre qu’elles soient, ne peuvent demander à leurs freres plus que le tiers de la succession : Et quoy que ces dispositions soient assez claires pour informer les Jurisconsultes que les filles ne peuvent avoir que le tiers, il pouvoit y avoir de l’ambiguité, si hors le cas des promesses et des dons faits par les peres et meres, ou quand il n’y avoit que deux freres ou une fille, elle devoit avoir le tiers pour son mariage avenant ; que si la Coûtume a eu cette intention de leur accorder le tiers, il étoit plus à propos qu’elle s’en expliquât en cette sorte que d’user de cette expression étrange et ambigué de mariage avenant, qui donne lieu de croire que ce mariage avenant doit être quelque chose de moins que le tiers ; ainsi le plus ou le moins est au pouvoir des parens : Et quand ils ont usé de cette faculté, comme ils ne sont pas les Juges souverains de cette arbitration, on ne manque point à appeler de leurs jugemens, et alors le plus ou le moins dépend du sentiment des Juges.

Par les Loix des Hebreux les filles ne succedoient point ; on donnoit à la fille qui se marioit la dixième partie des biens du pere ; mais cette dixième partie se payoit d’une manière d fort différente de nôtre usage : quand il y avoit plusieurs filles et que l’ainée avoit eu sa part en la mariant, celle qu’on marioit en suite avoit encore la dixième partie de ce qui restoit au d pere, ex eo quod residuum erat, non ex totius assis summa disumebatur : Par exemple, si le pere avoit laissé trois cens livres et plusieurs filles à marier, on donnoit trente livres à la premiere qui e marioit, qui étoit la dixième partie, et comme il ne restoit plus que deux cens soixante et dix livres, la seconde n’avoit que vingt-sept livres, et la troisième vingt-quatre, ainsi à proportion ;Selden . de Success. ad leg. Hebraor. c. 1o.

Ce n’est pas être fort sçavant que d’être instruit que le mariage avenant consiste au tiers des successions échûës en ligne directe, déduction faite des charges ; la differente nature des g biens, leur situation et leur valeur incertaine, la diverse manière de partager les fiefs, les rotures et les rentes constituées, et la contribution qu’il faut aussi regler entre les freres, causent un tres-grand embarras, quand il faut proceder à cette liquidation par des parens qui igno-rent le plus souvent la Coûtume et les maximes. Cela merite une discution tres-particulière pour la contribution entre les frères, je la remettray sur l’Article 364.

Pour faire exactement cette arbitration il faut distinguer la nature des biens, et leur situation, et proceder en suite à leur estimation selon leurs qualitez.

En Normandie la succession d’un défunt peut consister en meubles, en rotures, en fiefs, et en rentes : Pour les meubles les filles non reservées à partage n’y ont que le tiers ; et quoy que Berault ait été fort irresolu touchant la part qui peut appartenir aux filles dans les meubles, comme on l’apprend par ce qu’il a dit sur cet Article, et sur le 270. c’est une regle certaine di qu’elles n’ont que le tiers quand elles sont reduites au tiers pour leur mariage avenant, Art. 51. lu Reglement de l’an 1666.

si la succession consiste toute en rotures l’arbitration du mariage avenant est plus facile, car les filles ont le tiers quand il n’y a point plus de freres que de soeurs : et dans le nombre des rotures qu’il faut estimer, on comprend même le préciput roturier que la Coûtume generale donne à l’ainé, suivant l’Arrest du 18 de Juin 1669. donné en l’Audience de la Grand. Chambre, entre de Cretot et Langlois, plaidans Everard et Dorville : Il augmente le mariage des soeurs parce que l’ainé en doit recompense, et c’est en quoy ce préciput Roturier de la Coûtume generale. est different du préciput de Caux : Celui-cy n’entre point dans l’estimation des biens pour accroître le mariage des soeurs, mais seulement pour la contribution entre les freres, commeR l a été jugé pour Mie Adrien de Limoges, sieur de S. Saen, contre Charles-Antoine de Valles, sieur de Boisnormand, ayant épousé la seur dudit sieur de Limoges, par un premier sArrest du 2r d’Aoust 1664. au Rapport de M Deshommets ; la raison de cette difference est que le préciput de Caux appartient à l’ainé sans en faire aucune recompense. Or les soeurs n’ayant point plus de droit que les freres, et les freres n’ayant rien sur le préciput, leur condition ne peut pas être plus avantageuse, ce qui sera expliqué plus amplement ailleurs.

Sil y a des biens en bourgage le mariage avenant des filles se regle de la même manière que sur les rotures, car elles n’ont part égale aux biens qui sont en bourgage que quand elles sont reservées ou reçûës à partage.

bli dans la succession outre les rotures il y a un ou plusieurs fiefs, ou que tout le bien de la succession consiste en un seul fief qui soit choisi par préciput, et qu’il y ait plusieurs freres et oeurs, l’arbitration du mariage avenant devient beaucoup plus mal-aisée : je distingueray ces diverses espèces.

S’il y a un fief et des rotures, que le fief soit pris par préciput, et les rotures acceptées par les puisnez, pour parvenir à l’arbitration du mariage avenant des soeurs il faut regler auparavant à quoy se monte la part des puisnez, déduction faite de leur contribution au mariage de leurs seurs, suivant l’Article 269. Par-l’Arrest du sieur de S. Saen, du 30 de Juin 1665. la fille ne peut avoir une plus grande part qu’un puisné : Dans lespece que je viens de proposer, quand il y a un fief et des rotures le mariage avenant de la soeur n’est point estimé, i eu égard à la valeur du fief et des rotures, pour en donner le tiers aux seurs. On en use d’une pi autre manière, chaque seur ne peut avoir qu’autant qu’un puisné, ainsi lorsque les puisnez ont Pû accepté les rotures, pour faire la liquidation du mariage on régarde seulement ce que vaut la part de chaque puisné sur la roture, déduction faite de sa contribution, et de celle de l’ainé à cause de son fief. La question s’offrit entre Mre de Vieuxpont, sieur d’Auxouville, et ses de freres, et une seur : Mré André de Vieuxpont, sieur d’Auzouville, laissa cinq fils et trois filles. m Le sieur d’Auzouville prit par préciput un fief de grande valeur, et les puisnez n’eurent que re quelques rotures : une seur mariée demanda son mariage avenant à ses freres, ils luy accorderent à proportion de la part d’un puisné, et le sieur d’Auzouville offrit d’y contribuer comme à une dette de la succession, pro modo emolumenti, à proportion de la valeur de fon fief. La seur disoit que la Coûtume ne regle et ne limite pas toûjours la legitime des soeeurs à la part des puisnez, quand il n’y a qu’un fief en la succession, il n’appartient qu’une provision à vie aux puisnez : au contraire les seurs ont leur part en proprieté, et par l’Article 364. les freres contribuent au mariage des socurs selon les biens de la succession, ainsi son mariage ne devoit pas être reglé selon la part des puisnez, le fief choisi par préciput devant être dans l’estimation du mariage avenant : Le Bailly avoit debouté la soeur de ses conclusions, qui sembloient être d’autant plus favorables, qu’elle representoit que les puisnez n’avoient accepté les rotures que par intelligence avec leur ainé, et pour luy faire préaudice, parce qu’il leur êtoit beaucoup plus utile d’abandonner les rotures pour prendre leur provision à vie sur le fief, et neanmoins la Sentence fut confirmée par Arrest du 18 de Mars 1642. en l’Audience de la Grand : Chambre

Dans le procez du sieur de S. Saen, le sieur de Valles son beau-frere avoit la même prétentions dans la succession il y avoit des biens en Caux et hors Caux, pour les biens de Caux on jugea que la seur n’auroit qu’autant qu’un puisné, et sur les biens qui étoient dans la Coûtume generale. de sieur de Valles, au droit de sa femme, demandoit que les fiefs entrassent dans l’estimation de son mariage, prétendant qu’il ne pouvoit être reduit à la portion d’un puisné, à quoy le sieur de S. Saen répondoit, qu’encore que les puisnez n’eussent qu’une provision à vie sur le fief, et qu’au contraire les soeurs ayent une part en proprieté, toutefois la part des soeurs ne peut exceder. celle des puisnez ; ce qui fut jugé, au Rapport de Mr Deshommets, par l’Arrest cydessus datté du 30 de Juin 1668. Je parleray souvent de cet Arrest, parce qu’il a terminé plu-sieurs questions importantes.

Si dans l’espèce cy-dessus il n’y avoit eu qu’un fils qui eût choisi le fief par préciput, et que les filles eussent abandonné les rotures pour demander leur provifion sur le fief, elles auroient le tiers du fief en proprieté et non point à vie, comme auroient eu les freres puisnez, parce qu’en ce cas la condition des filles est plus avantageuse que celle des freres : on ne pouvoit en user autrement, les loix qui ont un soin particulier, que les filles puissent être pourvûës en mariage, ont sagement prévû qu’elles ne trouveroient point de party, si elles ne leur donnoient quelque portion en proprieté.

Il faut proposer une nouvelle espèce, quand il y a plusreurs freres et plusieurs seurs, et plules sieurs fiefs dans la succession ; s’il y a plusieurs, fiefs choisis par préciput, et qu’il reste encore et des fiefs et des rotures, qui soient partagez entre les autres frères, les fiefs choisis par préciput n’entreront pas dans l’estimation du mariage avenant, mais ils y contribuëront, et on considerera seulement la valeur de la part d’un cadet pour en donner autant à chacune des filles, suivant l’Arrest du sieur de S. Saen cy-devant datté

Que s’il n’y a qu’un fief en la succession, et plusieurs freres et soeurs, et que l’ainé prenne le fief par préciput, scavoir si les deux tiers demeureront entièrement à l’ainé, et s’il n’est pas quitte, tant du mariage des soeurs que de la provision à vie de ses puisnez, en leur abandonnant le tiers : ou si ce tiers doit appartenir aux puisnez pour en joüir à vie par les puisnez de leur part, et par les soeurs en proprieté : ou bien si ce tiers demeure aux filles à charge de contribuer pour un tiers à la provssion des puisnez, et par l’asné pour les deux autres tiers C’est une maxime. certaine que le frère ainé n’est pas quitte de la provision à vie de ses puisnez, et du mariage de ses seurs en leur abandonnant à tous ensemble le tiers du fief, I est encore obligé à contribuer aux mariages des seurs ; et pour regler les droits ; tant des puisnez que des soeurs, supposons que le fief soit de trois mille livres de rente, et qu’il y ait deux puisnez et deux seurs, la part de chaque seur qui luy appartiendra en proprieté ne pourra être plus grande que la provision à vie de chaque puisné, et c’est pourquoy pour regler la part qui reviendra à chaque fille, il faut sçavoir ce qui restera à chaque puisné aprés sa contribution levée.

Cela posé, on estime le fief au denier vingt à vingt mille écus, qui seront pour le tiers vingt mille livres, qui font mille livres de rente, lesquelles divisées en deux c’est pour chaque cadet cind cens livres de provision, et les faisant contribuer pour leur tiers de cent vingt-cinq livres chacun, il ne leur resteroit que trois cens soixante et quinze livres à chacun, et l’ainé contribuant pour les deux tiers à proportion des puisnez, il doit payer cinq cens livres de rente ; ainsi ce qui reviendroit aux deux seurs pour leur mariage avenant se monte à sept cens cinquante livres de rente, qui étant partagées par moitié, c’est pour chacune trois cens soixante et quinze livres, ce qui rend leur portion égale à celle des puisnez.

Pour les rentes constituées il est sans difficulté que le mariage avenant se regle de la même maniere que pour les rotures, quand la succession est en Normandie et que les debiteurs des rentes y ont aussi leurs biens : Il ne peut y avoir de problême que quand la suc cession échet en Normandie, et que les debiteurs des rentes constituées ont leurs biens sous des Coûtumes où les filles partagent également ; mais il est sans doute que les filles qui ne sont point reservées à la succession de leur pere, mort en Normandie, ne peuvent avoir que mariage avenant sur les rentes constituées sur des personnes dont les biens sont assis hors Normandie ; la raison est que pour être reçû à partager une succession il faut être habile à succe-vier : or en Normandie les filles non reservées nen sont point capables, et par consequent elles ne peuvent avoir, part aux rentes dûës par des personnes domiciliées hors la Province, la différence de nôtre usage et de celuy de Paris pour le partage des rentes constituées a fait faître cette contestation : suivant nôtre usage les rentes constituées se partagent selon les Coûtumes des lieux où les biens des redevables sont situez ; au contraire suivant l’usage du Parle-ment de Paris elles se partagent suivant la Coûtume du domicile du creancier.

Cette question s’offrit en l’Audience de la Chambre de l’Edit : Une femme d’Alençon nommée Bellou laissa des biens en Normandie et quelques rentes constituées à prendre sur des particuliers de la Province du Mayne, qui avoient tous leurs biens en cette Provinoe en procedant au partage de ces biens entre les frères et les seurs, les seurs demeuroient d’accord qu’elles ne pouvoient demander que mariage avenant sur les biens en Normandie, puis-qu’elles n’étoient point reservées à partage : ; mais elles prétendoient entrer en partage pour les rentes dûës en la Province du Mayne ; le Juge d’Alençon les en ayant refusées, sur l’appel Maurry leur Avocat disoit que par l’usage de cette Province les rentes étoient partagées luivant la Coûtume des lieux où les redevables avoient leurs biens, d’où il concluoit que ces rentes étant dans la Province du Mayne où les filles partagent avec leurs freres, on leur avoit refusé sans raison le partage. Carué pour les intimez faisoit la distinction entre succeder et partager ; pour pouvoir partager il faloit être capable de succeder : or la succession étant échûë en Normandie, et l’incapacité de succeder se reglant suivant la Coûtume du lieu où la succession est échûë à l’égard des rentes constituées, les filles étoient excluses des droits succes-sifs ; car si les soeurs vouloient suivre l’usage de Normandie touchant le partage des rentes, elles devoient pareillement s’y conformer pour la capacité de succeder, si au contraire elles prétendoient se prévaloir de la Coûtume du Mayne pour devenir capables de succeder aux rentes qui se trouvent dans son Ressort, elles s’engageoient en même temps à garder l’usage. du Parlement de Paris touchant le partage des rentes, où elles se divisent suivant la Coûtume du domicile du creancier, ce qui les excluoit d’y avoir partage, parce que le crean-cier avoit son domicile en Normandie : Par Arrest du 20 de Février 1652. on mit sur l’appel hors de Cour ; les parties étoient les nommez Hondebourg-all reste à parler des Offices, mais puisqu’ils sont reputez immeubles les soeurs y doivent aussi prendre part, laquelle doit être reglée de la même manière que sur les rotures

Il ne suffit pas de connoître la part que les filles peuvent avoir dans les diffenentes especes de biens que j’ay proposées ; l’estimation des biens, la liquidation et la repartition entre les puisnez et les soeurs, est tres-difficile, sur tout dans la Coûtume de Caux.

Pour l’estimation des héritages elle se fait en cette manière ; les rotures sont estimées au denier vingt, et quoy que les fiefs soient estimez ordinairement au denier vingt-cinq, néanmoins à l’égard des filles, et pour la part qui leur appartient, leur estimation n’excede point le denier vingt, par cette raison que si l’on donnoit la part en essence à la fille, ce ne seroit qu’une roture en sa main : cela fut jugé pour-les Demoiselles de Mongommeri, et depuis pour le sieur de S. Saen, et la Cour en a fait un Reglement, Article 52. du Reglement de l’an 1666.

L’estimation ne se fait aussi que sur le pied du revenu des héritages, sans mettre en conside ration les bois de haute-fûtaye et les batimens, sinon entant qu’ils augmentent le revenu, Aricle 52. du Reglement, et on n’a point suivi l’Arrest remarqué parBérault .

Les biens se doivent aussi estimer suivant leur valeur au temps de la mort du pere, comme Je l’ay remarqué sur l’Article 255.

Cette estimation ne pouvant être faite sans frais, on ordonna par l’Arrest du sieur du Plessis-Châtillon, du 14 de Mars 1638. que l’estimation se feroit conjointement aux dépens des freres et des seurs ; mais pour éviter aux grands frais la Coûtume a prudemment ordonné que cette arbitration fe feroit par les parens, dans cette vûe qu’ils rendroient gratuitement cet office à leurs proches, et par cette raison il fut dit par un Arrest qu’encore que cette, estimation se fasse avec les acquereurs du frere on ne doit y appeler que des parens ; et par Arrest du 18 d’Avril 1667. au Rapport de Mr de la Motte-Labbé, on cassa une Sentence du Bailly. contenant qu’elle seroit faite par des Experts.

La liquidation entre les pulsnez et les leeurs, ou entre les soeurs seulement, produit aussi ces difficulrez,

Quand il n’y a que des rotures, des rentes, et des meubles, on fait une masse du tout pour en donner le tiers aux soeurs si elles sont en plus grand nombre que les frères ; mais on leur donne ne part égale à chaque frere, s’il y a plus de frères que de soeurs.

Sil se rencontre un fief et des rotures qui soient prises par les puisnez au lieu de la provision à vie sur le fief, le mariage avenant sera réglé pareil à la portion qui reste à chaque frere aprés sa contribution aux mariages de ses seurs levée et déduite.

Par exemple, les enfans sont au nombre de sepr, quatre fils et trois filles ; le fief pris par préciput par l’ainé est estimé à trente, six mille livres, et les rotures à douze mille livres : pour liquider le mariage des trois soeurs, il faut connoître ce qui reste aux puisnez leur contribution levée ; en donnant trois mille livres à chaque soeur le mariage des trois soeurs se montera à neuf mille livres, de laquelle somme l’ainé en payera les deux tiers, et les puisnez l’autre tiers, ce qui feroit mille livres pour chaque frère, laquelle levée sur les quatre millaalivres il leur resteroit trois mille livres, et par consequent le mariage de chaque sour doit être réglé à pareille somme. si tout le bien de la succession consiste en un fief, le tiers du fief sera estimé au denier vingt et chaque fille aura en proprieté autant que chaque puisné pour sa provision à vie, lorsque les puiinez et les seurs sont en nombre égal.

Dans la Coûtume de Caux cette liquidation est beaucoup plus embarrassée, quand le mariage des filles ne peut être entièrement payé sur les meubles ; car il faut remarquer que suivant les Art. 56. et 57. du Reglement de l’an 1666. l’ainé doit à cause du manoir et pourpris en Caux à luy déféré par la Coûtume, contribuer aux dettes de la succession et au mariage des filles, et neanmoins le manoir et pourpris n’augmentent point l’estimation du mariage avenant des filles, de sorte qu’il faut exactement distinguer ces deux choses : La première, que dans l’estimation duimariage. des seoeurs on ne comprend point le préciput de l’ainé, et toutefois quand il faut regler la contribution entre les freres, le préciput en Caux entre dans le nombre des biens contribuables Par exemple, il y a cinq enfans, trois fils et deux filles, le bien de la succession est de valeur de douze mille livres, et le préciput de trois mille ; des neuf mille livres les deux tiers appartiennent à l’ainé, et l’autre tiers aux deux puisnez

En procedant à la liquidation du mariage des soeurs, on ne doit pas comprendre le préciput, ainsi leur part ne sera point plus grande que celle des deux puisnez, leur contribution déduite, et cependant quand il faudra regler la contribution entre fainé et les puisnez, le préciput entrera dans l’estimation.

Commençons par la liquidation du mariage des filles ; le bien à leur égard ne consiste qu’en neuf mille livres, il en faut trois mille livres pour le tiers des deux puisnez, ce seroit quinze cens livres à chacun, mais cette somme diminuant par la contribution au mariage de leurs deux soeurs, ce mariage avenant ne pourra se monter qu’à la somme qui restera aux deux puisnez leur contripution levée : pour la trouver il faut liquider le mariage de chaque seur à onze cens vingt-cind vres, ce sera pour les deux soeurs deux mille deux cens cinquante livres, dont l’ainé portera pour ses deux tiers quinze ceus livres, il restera à payer pour chaque puisné trois cens soixante et quinze livres, et de cette manière leur partage sera reduit à onze cens vingt-cinq livres.

Cependant ils ne laisseront pas de demander à leur ainé une contribution à cause de son préciput, or emportant trois mille livres pour son préciput, et six mille livres pour ses deux tiers, qui font les trois quarts de la succession, il payera les trois quarts des deux mille deux cens cinquante livres, montant à seize cens onze livres dix sols.

Pour connoître en quoy consistent les biens de la succession, quand il y a des filles, il tombe en charge aux freres de faire inventaire, autrement si on les reçoit à partage, elles sont reçûës à jurer in litem, si on ne leur accorde qu’un mariage avenant, on leur ajuge ordinairement une somme pareille à celle que leur pere a donnée à la fille qu’il a mariée, si elles veulent s’y contenter : ainsi jugé, au Rapport de Mr de Sainte Foy, sur un partage de la Chambre des Enquêtes, décidé en la Grand. Chambre le 18 d’Aoust 1665. Mr Boulaye Compartiteur.

En attendant le payement le frère doit l’interest au denier vingt jusqu’au mariage, et depuis le mariage au prix du Roy,