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Pensées 79 à 83

M :Montesquieu 1726/1727-1755.
D :Bottereau-Duval 1718-1731.
E :1734-1739.
U :1739.
H :1741-1742.
J :1742.
K :1742-1743.
F :1743.
I :1743.
L :1743-1744.
O :1745-1747.
P :Damours 1748-1750.
Q :1750-1751.
R :Saint-Marc 1751-1754.
S :1754-1755.
V :1754.
JB :Jean-Baptiste Secondat ?-1795.
T :écriture des manchettes 1828-1835

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M : Montesquieu.
D : Bottereau-Duval_1721-1731.
H : 1741-1742.
P : Damours_1748-1750.
E : 1734-1739.
L : 1742-1744.
O : 1745-1747.
T : écriture des manchettes
JB : Jean-Baptiste_Secondat.
J : 1742.
K : 1742-1743.
F : 1743.
E2 :
I : 1743.
R : Saint-Marc_1751-1754.

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Pensées, volume I

79

Vol des oiseaux[1]

Il y a la trois choses a considerer, la pesanteur de leur corps, l’etenduë de leurs ailes et la force du muscle qui pousse l’air[2] : il faut faire plusieurs observations pour plusieurs oiseaux, voir en leur laissant autant d’ailes qu’il faut pour le vol si l’étenduë ou diametre de l’aile est proportionnée a la pesanteur, et quel raport il y a avec la force du muscle, car plus le muscle est fort plus il agit sur l’air avec vitesse ; or c’est cette vitesse qui fait la force, temoin la feüille de papier qu’une balle perce sans la faire mouvoir : il y a outre ce {p.72} l’habitude, car les oiseaux non accoutumés a voler ne peuvent plus voler ; or ce qui fait que les hommes ne peuvent je crois parvenir a voler, c’est je crois si cela est 1º leur grande pesanteur ce qui demanderoit une aile trop etendue et trop difficile a remuer sans accident.
2º le mouvement de l’epaule qui devroit suppléer a celui du muscle de l’aile qui est si fort dans les oiseaux seroit trop faible dans l’homme, sans compter qu’il faudroit que le mouvement partit du centre de gravité et ce qui ne peut etre dans l’homme : pour suppléer a cela il faudroit que les ailes regnassent tout le long du corps, et si l’on y parvient il faudra que l’on imagine quelque machine par laquelle la force du mouvement de l’epaule soit augmentée[3].
3º le danger, si l’on avoit ce qu’il faut pour voler on n’y reussiroit pas pour cela, {p.73} tout homme peut nager, mais tres peu le sçavent et reduisent en acte ce qu’ils ont en puissance[4] ; dans ce cas il faudroit etre suspendu tout le long du corps sur une corde et se faire au mouvement de remuer les ailes ; ainsi les Romains avant de mettre une flotte en mer instruisirent leurs matelots futurs en leur faisant faire la maneuvre a sur terre. Nos oiseaux de basse cour ne volent pas je croi la plupart du tems parce qu’ils n’ont pas accoutumé de voler.
On pourroit donner de la force au mouvement du bras en faisant une espece de levier apliquant le point d’apuy au milieu du bras le long bras seroit depuis le bras jusqu’au point d’appui le court depuis le point d’appui jusqu’au point ou l’aile seroit attachée[5].
On pourroit donner une tunique de plumes qui seroit ass construite de manière qu’en {p.74} agitant l’aile pour monter elles fussent colées sur le corps aprés quoi elles seroient herissées.
Il faudroit choisir de jeunes enfants, plus de hardiesse, moins de pesanteur, plus propres a instruire, et par l’habitude les muscles du bras se fortifieroient.
Ils commenceroient a se laisser tomber d’un lieu un peu elevé sur un lieu garni de paille ou de matelats.
Je crois qu’il faudroit que leurs pieds tombassent sous le ventre et qu’on leur donnât une espece de queuë, la même action qui feroit mouvoir les ailes feroit pourroit faire mouvoir cette queuë.
Le point d’appui seroit appliqué a une ceinture de fer fort mince et legere.
Il faudroit comparer l’aile de plusieurs oiseaux avec leur pesanteur, on verroit ce qui resteroit pour la force du muscle. Il faudra voir les eclaircissemens que l’on pourra tirer du traité de Borelli De motu animalium. Il y a un livre sur le vol des oiseaux in fol[6]. Il faut le voir.

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Main principale D

80

{p.75} [Passage à la main M] Pour apaiser toutes disputes de relligion en France il faudroit deffendre aux moines de recevoir dans leurs [une lettre biffée non déchiffrée] aucun novice qui n’ut fait sa philosophie et theologie dans les universités et leur deffendre d’avoir des cours de ces sciances ches eux sans cela les disputes seront æternelles chaque ordre fera une secte a part et une secte tres unie, les moines ont toujours esté de grand disputeurs pace vestrâ liceat dixissé primi omnium ecclesiam perdidistis[1] dans les premiers siecles de l’eglise que les moines travailloint encor de leurs mains les moines de Scithie ne mirent ils pas tout en combustion voy p 48 Hist des ouvr. des scav. oct. 1691 extr. du 5e vol Biblioth. ecles. de Dupin[2]. Ils firent faloit faire passer cette proposition un de la trinité a esté crucifié idem p. 156 les moines causent la dispute sur les 3 chapitres. Chaque ordre a une {p.76} bibliotheque de ses ecrivains et les particuliers n’estudient que dans cette bibliotheque.

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Passage de la main D à la main M

81

Je croy que ce qui cause surtout la declinaison de l’ecliptique, c’est une certeine figure de la terre allongée je croy vers le pole[1], outre sa differente pesanteur le coté septentrional pesant plus vers le soleil que le meridional cela paroit meme en ce que dans le coté meridional sont les plus vastes mers la terre y est donc plus creuse et de plus l’eau pese moins que la terre a ce que je croy il faudra voir la dessus Hist. des ouvrag. des scav. fevri. 1692 art 14 Essay d’un nouveau sist. du monde[2]

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Main principale M

82

{p.77}

Eternité des peines

Il est difficille de comprendre par la raison raison seule l’eternité des peines des dannés car les peines et les récompenses ne peuvent estre establies que par raport a l’avenir on punit aujourd’hui un home affin qu’il ne faille pas demain, affin que les autres ne faillent pas aussi mais lors que les bienhureux ne seront pas libres de pecher, ny les damnes de bien faire, à quoy bon dess peines et des recompanseses ?

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Main principale M

83

L’affolement avec lequel les mahometans voyent

Mahométans
Mariage

les courtisanes et les danceuses fait bien voir que le serieux du mariage les ennuye[1].

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Main principale M


79

n1.

Montesquieu se démarque de Jean-Baptiste Verduc, (Nouvelle ostéologie […] et une dissertation sur le […] vol des oiseaux, Paris, L. d’Houry, 1693, p. 389-390) et s’inscrit dans le cadre de la physique moderne avec la pesanteur des corps inertes (Discours sur la cause de la pesanteur des corps [1720], OC, t. 8, p. 229-233) et la mécanique des corps animés : anatomie du squelette (Spicilège, nº 328) et force des muscles (Spicilège, nº 105e ; Essai sur les causes qui peuvent affecter les esprits et les caractères [env. 1734-1736], OC, t. 9, p. 266-267) sont prépondérantes. Verduc juge le vol humain impossible, même par artifice. Francis Willughby (The Ornithology, Londres, J. Martyn, 1678) imagine d’ajuster des ailes artificielles en utilisant les muscles des jambes, et non des bras. La question a passionné le chevalier de Vivens, ami de Montesquieu habitant à Clairac (voir Shackleton, p. 166-167). Il rédige une petite dissertation sur la question (« Du vol des oiseaux », étude qui daterait de 1742, reproduite dans : Mercure de France, t. CCLXIV, nº 898, 15 novembre 1935, p. 25-41).

79

n2.

Montesquieu reprend et modifie la formulation de Verduc, placée en tête du chapitre sur l’impossibilité du vol artificiel : « Il y a trois choses à remarquer dans le vol, sçavoir la force qui suspend en l’air le corps de l’animal, les instrumens propres qui sont les ailes, & enfin la resistance du corps » (Jean-Baptiste Verduc, Nouvelle ostéologie […] et une dissertation sur le […] vol des oiseaux, Paris, L. d’Houry, 1693, p. 387).

79

n3.

Selon Verduc, pour voler, l’homme devrait avoir des muscles pectoraux proportionnés à son poids et aucune machine ne permet d’obtenir artificiellement cette proportion (Jean-Baptiste Verduc, Nouvelle ostéologie […] et une dissertation sur le […] vol des oiseaux, Paris, L. d’Houry, 1693, p. 387-388).

79

n4.

Verduc remarquait que, pour nager, les hommes, contrairement aux animaux, doivent l’avoir appris. Les mouvements acquis permettent de pallier les défauts du corps humain pour se tenir dans l’eau et respirer (Jean-Baptiste Verduc, Nouvelle ostéologie […] et une dissertation sur le […] vol des oiseaux, Paris, L. d’Houry, 1693, p. 408-409).

79

n5.

« Levier » et « point d’appui » sont des termes de mécanique dont Verduc présente l’usage technique en ouverture de sa dissertation (Jean-Baptiste Verduc, Nouvelle ostéologie […] et une dissertation sur le […] vol des oiseaux, Paris, L. d’Houry, 1693, p. 308-312).

79

n6.

Giovanni Alfonso Borelli, De motu animalium […], Leyde, P. Van der Aa, 1710 (Catalogue, nº 1411, transcription secrétaire E, 1734-1739).

80

n1.

« Si vous me permettez de le dire, c’est vous les premiers artisans de la ruine de l’église » (nous traduisons). Citation empruntée à Pétrone, dans laquelle Montesquieu a substitué ecclesiam (l’église) à eloquentiam (l’éloquence) (Pétrone, Satyricon, Paris, H. Hunot, 1601, 2, 2 – Catalogue, nº 2136-2137). La formule originale était adressée aux rhéteurs, accusés d’être responsables de la dégradation de leur art par l’abus de procédés artificiels.

80

n2.

Nouvelle bibliothèque des auteurs ecclésiastiques […] d’Ellies du Pin (Mons, Huguetan, 1691, t. V ; extrait paru dans l’Histoire des ouvrages des savants, octobre 1691, art. VII, p. 48, 56-57).

81

n1.

La « figure de la Terre » est l’objet d’une querelle scientifique au début du XVIIIe siècle : aplatie aux pôles pour Newton et Huygens, la planète serait allongée selon leurs adversaires (Cassini, Maraldi et La Hire fils) : voir Vincent Deparis et Hilaire Legros, Voyage à l’intérieur de la Terre. De la géographie physique à la géophysique actuelle. Une histoire des idées, Paris, CNRS Éditions, 2000, p. 162-205.

81

n2.

Compte rendu de l’ouvrage anonyme Essai d’un nouveau système du monde (Paris, J. Cusson, 1691), qui ne mentionne pas la question de l’écliptique (Histoire des ouvrages des savants, février 1692, article XIV, p. 263-269 ; voir aussi Journal des savants, 1692, p. 67-70).

83

n1.

Chardin, évoquant les danseuses et les courtisanes de Perse, souligne l’emprise qu’elles peuvent avoir sur leurs amants, qui se prétendent « charmez & ensorcelez » (Chardin, t. II, p. 253).