

Structure de recherche associée à la MRSH : Espaces maritimes Date : 24/01/2014 Lieu : Saint-Vaast-la-Hougue Durée : 54:46 | ![]() |
Cette communication a été donnée à Saint-Vaast-la-Hougue, dans le cadre d'une journée d'études organisée par le pôle Espaces maritimes, sociétés littorales et interfaces portuaires de la MRSH, journée consacrée au vocabulaire maritime et aux dictionnaires.
Après avoir été professeur de français, latin et grec dans l'enseignement secondaire français de 1974 à 1988, Nicole Guilleux enseigne depuis 1989 la langue et la linguistique grecques à l'université de Caen (Basse-Normandie). Elle s'est spécialisée en linguistique historique et comparative, soutenant en 1983, une thèse de doctorat portant sur des Problèmes de flexion nominale en grec mycénien. Elle s'est aussi intéressée à la langue de l'épopée homérique et de la tragédie, ainsi qu'à la lexicologie, principalement grecque, mais aussi latine et française.
Résumé de la communication
Le vocabulaire maritime des premiers Grecs se caractérise par un paradoxe. Alors que les Indo-Européens possèdent un nom de la mer (latin mare, d'où notamment français mer ; breton mor, irlandais muir... ; allemand Meer ; russe, bulgare, slovène... morje, polonais morze...), les Grecs ignorent ce mot et, à la place, en utilisent quatre autres. Cette bizarrerie lexicale peut s'expliquer si l'on adopte le point de vue des nouveaux arrivants, en considérant les différentes expériences qu'ils ont pu avoir de la mer, dont ils ignoraient tout. Cet élément nouveau s'est révélé à eux sous des espèces variées : « eau salée » (hē háls), « vaste plaine » liquide du large (tò pélagos) ou « espace dangereux à traverser » (ho póntos), sans compter le nom générique, hē thálassa, probablement emprunté aux habitants du cru.
Dans le second versant de la conférence, l'accent est mis sur la documentation grecque la plus ancienne, celles des archives des palais mycéniens (Cnossos, Pylos, Mycènes...). Malgré l'aspect fragmentaire des textes rédigés en linéraire B et la difficulté à les interpréter, on y trouve, clairement attestés, plusieurs mots reposant sur háls et sur póntos. Ces témoignages écrits, même s'ils sont peu nombreux, confirment ce que le reste des données archéologiques donne à voir : les Grecs de l'époque mycénienne, qui vécurent entre continent et Crète dans la seconde moitié du deuxième millénaire avant notre ère, s'étant mis à l'école de leurs prédécesseurs Minoens, savaient tirer profit de la mer dans les zones côtières, aussi bien que naviguer en Méditerranée.