

Auteur : Jean-Marc Fournier Date : février 2009 Structure de recherche associée à la MRSH : ESO-Caen |
Un cimetière est un lieu généralement bien délimité et clos où sont enterrés les restes des morts, corps ou cendres. Cependant, la notion de cimetière n'a pas toujours existé dans l'histoire. De plus, d'un pays à un autre, les usages des cimetières varient beaucoup. L'exemple du cimetière de Valparaiso illustre bien une certaine géographie sociale des cimetières : après la mort, les emplacements choisis pour l'enterrement des restes des corps varient en fonction de l'appartenance sociale.
Au premier coup d'œil, en pénétrant dans le cimetière par l'entrée principale, on observe tout d'abord d'immenses mausolées composés, pour les plus majestueux, de plusieurs pièces sur plusieurs étages : petites chapelles, caveaux, patios avec autels, escaliers, couloirs ainsi que divers recoins pour s'asseoir ou se recueillir. Ici, les riches et puissants ont acquis pour l'éternité un emplacement de choix pour exprimer durablement leur passage sur terre.
Un deuxième ensemble, moins monumental, se détache nettement : celui de tombes et caveaux en marbre, plus ou moins grands, qui expriment une certaine opulence sans constituer toutefois de véritables mausolées. A proximité immédiate, s'impose au regard un troisième ensemble, massif : de grands blocs de béton rectangulaires, sans aucune décoration, alignés et découpés en milliers de cases de taille strictement identiques. Pour chaque case, on peut compter jusqu'à une dizaine de noms de personnes appartenant à la même famille. La photographie ci-contre illustre le contraste entre ces tombes destinées aux classes moyennes (à l'arrière plan) et les tombes de familles plus aisées revendiquant leur statut social plus élevé (au premier plan).
Enfin un dernier ensemble de tombes s'impose en pénétrant plus en profondeur dans le cimetière : celui des tombes individuelles non recouvertes de dalles et donc plus temporaires. Ici, beaucoup de corps d'enfants ont été enterrés et on y a parfois installé des jouets : petites cabanes en plastique, nounours, cerfs-volants, etc.
La société chilienne est certainement l'une des plus ségrégées au monde. Ses cimetières offrent aux géographes des schémas d'organisation de l'espace très clairs et parfois même relativement simples. A travers leur lecture, on repère l'éventail des inégalités sociales depuis les mausolées jusqu'aux fosses en passant par ce que l'on pourrait appeler un certain « logement social des morts » destiné aux classes moyennes. Parce qu'il est relativement caricatural, l'exemple chilien aide à comprendre l'organisation des espaces des autres sociétés.