Séance du 28 février 1788
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Séance du 28 février 1788,
tenue à
l’hôtel du Parlement d’Angleterre,
Rue
CoquéronCoq-Héron
M. Clavière, président.
M. de Warville a fait
lecture des deux lettres suivantes, adressées à
M. le marquis de La
Fayette, et a M. Hérault, lesquelles
il a été
autorisé à signer par le Comité.
(à M. de La Fayette)
Vous avez été, M., le
défenseur de la liberté en Amérique ; ce titre vous
appelle naturellement dans les sociétés qui ont
pour objet de rendre cette
liberté à quelque classe
d’hommes que ce soit. Tel est l’objet du comité qui
se forme à Paris, à la prière et à l’instar de
celui de Londres. Il se propose
de
concourrirconcourir
avec ce dernier à l’abolition de la traite et de
l’esclavage
des Nègres. Cette Société, à laquelle
j’ai fait part de votre réponse, espère
toujours
que vous vous ferez un plaisir de vous ranger parmi ses
membres.
Sans doute, il serait à désirer qu’il
existât une Assemblée nationale
en ce moment, qui
voulût, non pas rivaliser avec le Parlement
d’Angleterre,
mais
concourrirconcourir
avec lui pour sanctionner cette belle révolution. Mais,
parce qu’on ne peut fixer encore l’instant où
s’assembleront les États
généraux, doit-on différer
d’éclairer la France sur cet objet ? La publicité
actuelle
ne mûrira-t-elle pas les esprits ?
N’est-il pas nécessaire que la lumière précède
cette assemblée solennelle ? Car, les esprits en
étant pénétrés se laissent moins
entraîner par les
préjugés, la passion, la corruption.
Le mémoire
qui contient le plan de cette Société, et que j’ai
l’honneur de
vous envoyer, vous convaincra qu’il
n’est pas question de s’abandonner
uniquementuniquemt
ici à des spéculations philosophiques, il vous
convaincra que nous marchons
sur les pas de cette
Société de Londres, dont vous
reconnaissez l’utilité ; que
nous nous proposons,
en outre, un objet particulier à la France. Il vous
convaincra que sans lumières préalables, il est
impossible soit au ministère, soit
aux États
généraux de prendre un parti sur cette question, et que
sans une
Société telle que la nôtre il est
impossible de se procurer de pareilles
lumières. Il
vous convaincra, enfin, que sans elle, il serait
difficile, et
peut-être impossible de vaincre les
obstacles que l’intérêt particulier des
planteurs
ne manquera pas d’élever ; qu’il élèvera peut-être avec
plus de
succès en France qu’en Angleterre, parce
qu’ici, plus que chez nos voisins,
la faveur, la
richesse, l’intrigue ont plus d’influence pour retarder
les
innovations qui leur nuisent.
Cette
Société étant utile, patriotique, et même d’une
nécessité
indispensable, tous les bons Français,
tous les amis de la liberté et de l’humanité
doivent y prendre part. Elle vous réclame à ce
titre, et nous craindrions si
vous n’y veniez pas,
que cette absence ne fit votre critique ou la
nôtre.
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(à M. Hérault)
Après vous avoir remercié, Monsieur, de la bonne opinion que
vous voulez
bien avoir de M. Clavière
et de moi,
permettez-moi de vous faire part des
regrets de la
Société pour l’abolition de la traite des Nègres à laquelle
j’ai
communiqué votre lettre. Vos
talenstalents,
votre amour pour la liberté et le
bien public ; la
place que vous occupez, qui vous met à portée, et qui, par
là
même, vous impose le devoir de les défendre, lui
faisaient entrevoir dans
l’association de votre nom
avec ceux qui la composent déjà, un sûr
garant de ses
succès. Il est vrai qu’après avoir considéré les motifs
qui vous en éloignent, elle espère encore vous ramener
dans son sein.
Le Parlement voudrait-il empêcher vous,
et chacun de ses membres de
prendre part à une société
que le droit naturel prescrit et l’humanité
commande ?
Est-il vraisemblable que jamais une si belle cause éprouve
des contradicteurs qui la fassent porter devant un
tribunal ? Et ce
tribunal serait-il fondé à récuser un
de ses membres sous prétexte d’une
association, comme
si le sublime motif de l’humanité qui en fait la
base
pouvait être assimilé au soupçon d’un intérêt personnel qui,
seul, peut fonder une récusation ?
Observez bien ici, Monsieur, qu’il n’est question ni
d’assemblée illicite,
ni de conjuration. Nos travaux
ont pour objet la cause la plus
sacrée, et le crime
seul s’enveloppe du mystère, et le crime seul
conjure.
Lisez, je vous en supplie, le mémoire que je joins ici : vous
serez
convaincu de la pureté de nos vues ; je dis plus, de la
nécessité où est tout ami de l’humanité de se joindre à
nous ;
du devoir que le ciel lui impose, s’il est en
place, d’employer tout
son crédit, tout son pouvoir
pour faire
réüssirréussir
cette société. Des
milliers d’hommes gémissent : y
a-t-il à balancer ? L’enthousiasme
pour leur liberté
devient général, il en faut profiter : et si celui
qui
existe en Angleterre est l’ouvrage d’une seul société, que
ne doit pas espérer la nôtre, en France, où
l’enthousiasme
s’allume, se répand bien plus aisément
?
Arrêté qu’avec chacune des lettres, il enverrait un exemplaire
imprimé du discours du 19 février.
Sur la question proposée par M. de Warville, si le
Comité signerait
le discours du 19 février, et s’il serait publié
avec cette signature,
Arrêté, après avoir pris les opinions, prises
en deux tours, qu’il fallait
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poser en silence les
fondemensfondements de
cette Société, éviter l’éclat, publier
le discours sans nom et sans
signature, et l’envoyer aux
différensdifférents
journaux pour étendre la publicité.
Sur la motion faite par M. le comte de Mirabeau,
si l’on
indiquerait une adresse pour recevoir les souscriptions,
après avoir
recueilli les opinions en deux tours, il a été résolu
qu’on suspendrait
jusqu’après la publication du discours pour
indiquer une adresse.
M. le comte de Mirabeau
ayant offert à la Société d’insérer dans
son Analyse
des papiers anglais, tous les résultats des
travaux de
cette Société, et tout ce qu’elle jugerait à propos de
publier ; lui ayant
de plus offert en communication tous les
papiers anglais qu’il
reçoit chaque semaine, ce qui épargnera à la
Société beaucoup de
frais ; ayant offert, enfin, de recevoir par le
couvert franc, dont il
jouit, tous les pamphlets que la Société
croirait devoir se procurer
à Londres,
Arrêté que la Société
remercie M. le comte de Mirabeau de
toutes ces offres, et les accepte avec empressement et
reconnaissance.
M. le marquis de Beaupoil
Saint-Aulaire ayant envoyé à chacun
des membres de
cette Société un exemplaire de son nouvel ouvrage,
intitulé : De l’unité du pouvoir
monarchique.
Arrêté qu’il en sera remercié
au nom de la société.
Arrêté que M. Brissot de Warville
sera chargé de s’occuper de
louer un appartement non garni, où
puisse s’assembler commodément
le Comité.
Ajourné à mardi prochain 4 mars.
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