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« La sauvegarde des haies ne passera que par la remise à plat du modèle agricole »

Le chercheur Thibaut Preux a démontré, avec le géographe Daniel Delahaye, comment la transformation foncière des exploitations agricoles modifiait les bocages.

Propos recueillis par 

Publié le 25 juin 2023 à 06h00, modifié le 26 juin 2023 à 11h24

Temps de Lecture 3 min.

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Comment expliquer que les arrachages de haies se poursuivent alors que les grandes opérations de remembrement sont achevées depuis longtemps ? Thibaut Preux, maître de conférences en géographie à l’université de Poitiers et l’un des coauteurs avec Daniel Delahaye, professeur de géo­gra­phie à l’université Caen Normandie, d’une étude sur le sujet publiée en mai, décrit comment la transformation foncière des exploitations agricoles modifie les bocages.

Une haie en bordure de champ, sur la commune du Bô (Calvados), le 28 mai 2023.

En quoi la transformation foncière agricole est-elle différente du remembrement ?

Le remembrement est fait à l’initiative des communes pour regrouper des parcelles. Il a été beaucoup pratiqué dans les années 1950-1960, après plus d’un siècle d’émiettement de la propriété paysanne : on avait alors des exploitations avec quarante ou cinquante parcelles sur dix hectares.

Le regroupement foncier a été associé à des travaux de génie civil pour agrandir et simplifier les parcelles, mais aussi à des travaux hydrauliques, de drainage, d’agrandissement de chemins, de réseaux routiers… L’impact sur le paysage était alors assez radical : en quelques semaines, la commune faisait table rase du passé.

Aujourd’hui, les arrachages sont à l’initiative des agriculteurs eux-mêmes. Ils vont regrouper deux parcelles, agrandir une entrée de champ, supprimer une haie qui les gêne… Ce sont des changements beaucoup plus discrets mais qui, mis bout à bout, donnent le même résultat.

Ce sont donc des individus qui modifient le bocage ?

Au lendemain de la guerre, lorsque bon nombre d’exploitations faisaient moins de 10 hectares, une action individuelle pesait très peu. Aujourd’hui, dans les bocages normands, la moyenne est plutôt autour de 80 à 90 hectares, avec des exploitations qui font plus de 150 hectares. L’action d’une personne qui décide tout à coup d’arracher ses haies est extrêmement visible : quelques agriculteurs ont entre les mains le sort du paysage d’une commune.

L’agrandissement est-il la principale menace pour les haies ?

L’agrandissement des exploitations agricoles conduit les agriculteurs, notamment les éleveurs laitiers, à mécaniser leurs productions et à développer la culture céréalière et du maïs fourrager. Cela se traduit par une rationalisation des parcelles qui sont de plus en plus grandes et rectangulaires pour faciliter l’emploi d’engins agricoles. L’arrachage des haies n’est que le révélateur de tout un tas de processus, et notamment du retournement des prairies. Ce n’est pas un objet hors sol.

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Au-delà de l’érosion quantitative, il y a aussi une dégradation qualitative très nette du bocage. Les techniques d’entretien sont de plus en plus mécanisées, les arbres qui tombent après une tempête ne sont pas forcément remplacés, on utilise des traitements chimiques jusqu’au pied de la haie pour maximiser les rendements… Beaucoup de haies ne sont pas entretenues et meurent à petit feu.

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