Argentine, la dictature à hauteur d’enfant par Laura Alcoba : épisode • 2/4 du podcast Les écrivains racontent le monde

Laura Alcoba, 2011, Paris ©Getty - Ulf Andersen
Laura Alcoba, 2011, Paris ©Getty - Ulf Andersen
Laura Alcoba, 2011, Paris ©Getty - Ulf Andersen
Publicité

Dans son roman "Les rives de la mer douce", prix Roger-Caillois 2023, l'écrivaine et traductrice argentine Laura Alcoba revient sur son enfance pendant la dictature, d'abord fugitive dans son propre pays puis exilée en France.

Avec
  • Laura Alcoba Ecrivain
  • Nadia Tahir Maître de conférences à l'université de Caen

À partir du coup d’État militaire de mars 1976, les opposants politiques argentins se sont mis à raconter d’étranges histoires à leurs enfants. Des histoires où le grand méchant loup porte l’uniforme de la police militaire et des parties de cache-cache s’improvisent dans des planques prévues pour échapper aux perquisitions sanglantes. Des mots d’enfants pour décrire un monde d’adultes comme des milliers de parents argentins en ont adressé à leur progéniture entre 1976 et 1983.

C’est avec ces mots, le ton qui les accompagne et les silences qui les suivent que Laura Alcoba, fille d’opposants politiques, a appréhendé la dictature militaire. C’est à travers le souvenir de ses parents et de leurs phrases faites de mises en garde et de consignes inquiètes que Laura Alcoba a écrit Les rives de la mer douce, roman introspectif revenant sur sa vie des deux côtés de l’océan Atlantique. Jusqu’à ses 10 ans, côté argentin, où elle a vécu d’appartement en appartement, fuyant les rafles d’opposants et les rapts d’enfants. Côté français ensuite, lorsqu’elle a rejoint sa mère en exil à Paris et entretenu une correspondance avec son père emprisonné au pays.

Publicité

Comment un enfant appréhende-t-il la réalité politique de la dictature et la menace qu’elle fait planer sur ses parents ? Des années plus tard, l’écriture permet-elle de raviver ces souvenirs, voire d’en exhumer certains restés enfouis ? Et enfin, comment ce travail de mémoire fait-il écho à l’actualité argentine, marquée par le révisionnisme du gouvernement ?

Focus : Argentine : une politique mémorielle ambitieuse
Il y a près de vingt ans, le 24 mars 2004, l’ancien président argentin Nestor Kirchner annonçait la transformation de l’ESMA - l’ancien centre de détention et de torture des militaires - en Musée de la mémoire. À l’occasion de cette journée de commémoration, il demandait officiellement pardon, au nom de l’État, pour les crimes commis à cette époque. Un discours qui apparaît rétrospectivement comme la première pierre de la politique mémorielle mise en place par Nestor puis par Cristina Kirchner.

Références sonores

  • Premier discours du président de la junte, le général Jorge Rafael Videla, le 24 mars 1976 - Archivo Historico RTA
  • Témoignage de Chicha Mariani, co-fondatrice de l’association des Grands-mères de la place de mai, sur sa petite-fille Clara Anahi kidnappée lors de l’attaque sur la maison aux lapins - Canal Encuentro, août 2018
  • Interview de Victoria Villaruel, Vice-présidente de l’Argentine élue sur le même ticket que Jaier Milei, El agora Digital, septembre 2023
  • Témoignage de la chanteuse Mercedes Sosa - Archive Ina, Salle des fêtes, janvier 1980
  • Discours de Nestor Kirchner le 24 mars 2004 lors de l’inauguration de l’ESMA comme musée
  • Morceau de Mercedes Sosa - Sólo Le Pido a Dios (con León Gieco)

L'équipe